mardi 27 mai 2008

Courante

De toutes les invasions microbiennes et virales de cette année, je suis passée au travers... la grippe de décembre, les multiples gastro-entérites, les angines, les impétigos intempestifs... rien ne m'a atteinte, rien ne m'a touchée. Je suis un repoussoir à microbes.
Et là, je sens que vous vous dites que le titre n'a rien à voir avec les suites de Bach pour violoncelle seul... même par Yo-Yo Ma.
Effectivement. Elle a mis le week-end à mûrir, pour enfin se déclarer aujourd'hui.
Bilan : gastro.
Douloureuse et fiévreuse mais pas vomissante. C'est déjà ça.
Mais courante quand même.

Et puis de toutes façons, il n'y a pas de raison pour que je ne me laisse pas entraîner dans les délires scatologiques de la blogosphère... certaines parlent de merde (), d'autres sont un peu dedans (ici), d'autres encore en écoutent () et enfin, les autres en font (nan nan, cherche pas, je ne suis pas une balance... la liberté est en chacunE de nous).

Du coup je suis restée bien au chaud, à transpirer devant un écran vert (bah oui... Roland Garros en couvert, c'est vert...) et un bocal de thé au miel. Et puis quelques herbes pas chinoises du tout qui calment les spasmes intestinaux... ça détend.
Mais pas trop, car il faut rester mobile. Et pouvoir faire une accélération, avec virage en bout de piste, le tout sans relâcher les sphincters, pour atteindre l'endroit stratégique du moment, les chiottes. Endroit dans lequel on a sagement empilé un certain nombre de numéros de Closer, histoire de ne pas avoir trop à réfléchir (oui... j'ai essayé l'histoire des idées politiques, ça me bloque quand je suis sur le trône...).

Là, je le sais, tu te marres, et tu te dis "bien fait pour sa gueule, l'avait qu'à pas bosser avec des ados qui oublient systématiquement de se laver les mains après avoir déféqué".
Moi aussi, je me marre.
Quoique, je n'ai pas encore identifié d'où venait la contagion... j'hésite encore entre les ados (mais vu que j'étais en grève jeudi dernier et que je ne bosse pas au collège le vendredi, ça m'étonnerais qu'un virus mette autant de temps à incuber), mes collègues de l'IUFM (et là, ça serait vraiment dégueulasse comme état d'esprit, même si c'est un concours) et mes coéquipières de hand du match de samedi dernier (que, je le rappelle, nous avons gagné 35 buts à 9, sans aucune remplaçante).
Sauf que là, c'est un peu la panique. Je passe mon épreuve d'EPS (Education Physique et Sportive...) vendredi matin... j'espère que ce passage n'aura pas trop réduit mes capacités, déjà limitées par un manque une absence d'entraînement au 1500 m.
Oui. Tu as bien lu. 1500 m à parcourir en un maximum de 8 min pour avoir la moyenne. C'était mon objectif de l'an dernier. Il reste le même cette année. D'autant que je suis plus en forme physiquement que l'an dernier... enfin jusqu'à maintenant.

Mais trêve de digression... le bon côté des choses, c'est que j'ai pu mater le petit cul le match d'Amélie Mauresmo du coin de l'œil et que j'ai évité la surveillance de récréation sous la pluie battante, le tout entre deux siestes et plusieurs descentes culturelles impromptues.
Je crois que je vais même me faire arrêter 3 jours, histoire d'être bien en forme vendredi (oui... je n'ai aucune conscience professionnelle... j'aurai pu aller bosser, et refiler mon virus à tout le collège, histoire d'avoir moins d'élèves cette semaine... mais non, je me la joue égoïste sur ce coup).

Bon, faut que j'y aille, là...

samedi 24 mai 2008

Marie-Rose

Marie-Rose, c'est notre gardienne.
Rose, pour les intimes.

Tout a débuté un soir de décembre 2006.
En plein déménagement, elle a frôlé l'incident diplomatique avec MaB.
Mon père, mon frère et moi, tous trois taillés dans la même baratte à beurre (salé), étions occupés à transporter le réfrigérateur (ou la machine à laver, ou le clic-clac... un truc lourd, quoi !) de la camionnette à l'ascenseur. Rose, étant sortie pour nous aider tailler une bavette voir ce qu'il se passait, fait donc connaissance avec MaB :
- C'est vous qui emménagez ?
- Oui oui, au 5è étage, avec mon amie (ndlr : notez le flou dans lequel MaB a laissé Rose).
- Rooo, bah c'est gentil, y'a vot' grande qu'est venue vous aider ! (ndlr : en parlant de moi)
- Ah ah (gloups)... c'est pas ma "grande"... c'est elle qui s'installe avec moi.
- Ah... bon ben j'vais vous laisser, hein ! Z'hésitez pas, si y'a un problème...

Comme entrée en matière, on fait mieux. Avec MaB, on en a déduit que soit elle avait un problème de vue, soit je faisais très jeune, soit MaB faisait très vieille... un peu des trois sans doute !

Et puis ce fut mon tour de faire connaissance avec Rose. J'ai été obligée de la rencontrer pour faire écrire nos noms sur la boite aux lettres et l'interphone, pour récupérer le pass du parking, la pass de l'entrée, les clés du local à vélo... tout le bordel qui va avec un appart en ville.
Et forcément, on a discuté.
Forcément, comme toute gardienne qui se respecte, elle a voulu en savoir plus sur nous, sur moi, sur MaB.
Après avoir décliné nos âges, nos prénoms, nos activités professionnelles, elle a enfin posé une question moins impersonnelle :
- Sinon, pour la déco, vous allez réussir à vous entendre ?
- Ben je pense... comme tous les couples, en fait... chacun y met un peu du sien, pour un ensemble plus ou moins harmonieux ! (A l'époque, il n'y avait pas encore Valérie Damidot sur M6 qui nous a toutes et tous appris à maroufler le papier peint)
- Et comment vous faîtes pour l'organisation des courses, tout ça ?
- Ben comme tous les couples, on s'organise en fonction de nos disponibilités pour les faire...
- Non, mais vous achetez tout ensemble ?
- Ben oui, on va pas faire 2 caddies pour un seul réfrigérateur... on fait comme tous les COUPLES !!
- Ah oui... mais vous voulez dire que... ah... oui... comme tous les couples... vous n'êtes pas colocataires, alors ?
- Ça non. Une chambre, un bureau, un salon. Facile pour la déco, facile pour les courses. Allez, faut que j'y aille !

La fois d'après, elle m'a parlé de sa maison de campagne, de ses enfants, de sa future retraite de dans 3 ans, de son enfance de fille de batelier, de ses études arrêtées trop tôt, des habitants de l'immeuble, de ses varices qui la faisaient souffrir par temps orageux... évitant prudemment le sujet de notre "couple" en général, et de l'homosexualité en particulier, mais je sentais bien que ça la taraudait grave.
- Et vos parents sont au courant ?
- Oui oui, toute ma famille, toute la famille de MaB, et ça se passe très bien (je ne vais pas lui raconter ma vie, non plus... déjà que je ne le fais pas avec un psy, je ne vais pas le faire avec une gardienne d'immeuble qui ne monte même pas le courrier devant nos portes de palier !).
- Arf... c'est bien. Je ne sais pas comment je réagirai si mon fils venait me voir en me disant qu'il est homo... Je crois que mon mari le foutrait dehors...
Là, j'ai fait de l'information-prévention contre l'homophobie... que c'était comme le chocolat, qu'on ne choisissait pas d'aimer ou non les femmes (ou les hommes, ou les 2, mais fallait y aller doucement, pour ne pas la brusquer !).
- Maintenant qu'on est plus intimes (ndlr : ça c'est elle qui le dit...), je peux vous poser une question indiscrète ?
- Allez-y, je n'ai pas de tabou.
- Bon... euh... vu que vous êtes 2 femmes... euh... comment vous faites... euh...bon... qui c'est qui fait l'homme ?
- ... C'est-à-dire que nous sommes deux femmes, donc on fait comme deux femmes, en fait. Moi je préfère le ménage, le linge et le bricolage, MaB, elle, ce sont les courses et la vaisselle. On se répartit les tâches quotidiennes. Mais comme tous les COUPLES... votre mari doit bien vous aider à faire la vaisselle, non ?
- ...

Et plaf. J't'ai cassééééé ! Je sais bien qu'elle se demandait qui portait le gode ceinture à la maison... mais figurez-vous que je n'y ai même pas pensé (je pense que ça m'aurait un peu agacé si je m'en étais rendue compte, en fait), naïve que je suis !

J'ai tout de même rajouté que nous souhaitions rester discrètes sur notre vie privée, que si nous sympathisions avec des voisins, il serait temps de leur dire, qu'il existait des personnes homophobes, que si jamais il y avait un jour des inscriptions homophobes ou des comportements agressifs à notre encontre, je n'hésiterais pas à aller porter plainte au commissariat.
Coup de pression pour qu'elle ferme sa grande gueule de gardienne bavarde comme une langue de pute pie.

Depuis, elle nous adore. Nous sommes discrètes, polies, aimables, serviables... nous n'avons pas de chien qui pisse dans l'ascenseur, nous ne faisons pas des soirées dignes du Pulp dans notre salon tous les week-end, lorsque nous recevons, nos invitéEs ne gerbent pas dans l'escalier ou sur la moquette des parties communes...des locataires modèles.
Rose agit pour notre promotion.
Son mari me salue à peine... je crois qu'il a peur que je lui pète la gueule, vu que je sais conduire une grosse camionnette (surtout faire un créneau sans rétro central... mais avec direction assistée) et monter un clic-clac sans le modèle.

L'autre jour, alors que nous partions déjeuner chez les grands-parents de MaB, elle a surpris un petit bisou devant l'ascenseur...
- gloups... Bonjour !
- Bonjour les p'tites femmes !

Et voilà.
Je la soupçonne d'en avoir parlé à tout l'immeuble (enfin ceux qui passent devant elle... parce que moi, tant que je peux l'éviter, je le fais... sinon, elle me parle des heures...).
Je la soupçonne aussi d'être un peu jalouse de la répartition des tâches chez nous... à mon avis, elle a beau s'appeler Rose, chez elle, ça l'est beaucoup moins.

lundi 19 mai 2008

Vaines infortunes

Baptiste est mort cette nuit. Je donne jamais les vrais prénoms. Là, je le fais. Tout le monde s'en foutra. Il est mort. Il ne s'est pas couvert, il a tiré à vue, il est tombé en première ligne. Je me sens vide. A chaque fois, je me sens vide. Je m'en remettrai, je le sais. Je m'en remets toujours. Mon cerveau a cette étrange et abominable capacité à faire le tri. A faire de la place. Je suis capable de tout avec lui. Parce qu'il y a quelques années, j'ai pris la décision de me laisser guider et ça fonctionne plutôt bien. Des problèmes de fric, je zappe et vogue la galère. Un petit séjour entre les mains de nos chers services hospitaliers et le lendemain, l'étranger pensera que j'ai juste chopé une vilaine gastro. Une engueulade avec ma femme et sitôt après la folle envie de la serrer dans mes bras. Une vente qui pète, bah, une de perdue dix de retrouvées. J'essuie tout d'un revers de manche, comme si les merdes, c'était mon quotidien et que j'avais appris à respirer avec, au point qu'elles ne me coupent plus le souffle. Un pétard, un whisky et ça redémarre. Seulement, mon coeur lui, il m'emmerde. Il est bien là. A l'affût, prêt à bondir à la moindre alerte. Il est hémophile le con. Quand il commence à saigner, pas moyen de l'arrêter. Mais le cerveau fonctionne bien, il l'envoie bouler et tout redevient bien lisse. A l'ouest, rien de nouveau.

La lutte a commencé quand j'ai du braver les courants pour me faire une petite place. Les cœurs ne sont pas admis d'exister dans la cour des grands. Je lui ai donné l'ordre de ne l'ouvrir que lorsqu'il serait prié de le faire. Ça a marché. Parce qu'en plus d'être hémophile, il est d'un crétinisme absolu. Il ferme sa gueule et répond aux ordres.

Je masque toutes ces petites faiblesses maltraitantes sous la forme de procrastination et de je-m'en-foutisme. Du coup, d'aucun n'aura l'audace de penser que je sois capable de sensiblerie. Je suis une sorte de fauve. Vas-y, blesse moi et je te le rendrai au centuple parce que mon cœur est mort et que seul mon cerveau est assez machiavélique pour envoyer la réplique assassine, la réplique meurtrière, inutilement blessante mais qui vise toujours juste. Parce que si mon cœur est con, mon cerveau lui est écœurant d'intelligence. Il se suffit à lui-même, je suis incapable de le contrôler. Il va toujours là où il ne devrait pas aller, il utilise toujours sa suprême fourberie, son talent meurtrier. Mon cerveau est un psychopathe dangereux, il me dirige mieux que je ne l'abrite dans ma singulière boîte crânienne.

Je savais que Baptiste allait mourir. J'y étais préparée. Mais, fidèle à son principe de négligence, mon cerveau avait brillamment réussi à occulter l'information. Quand mon téléphone me l'a appris ce matin, je suis juste tombée dans les pommes. Pas longtemps, juste assez pour me regarder comme une merde le cul par terre. Flasque. Pauvre. Médiocre. Je me suis dégoutée de moi même de m'être laissée aller ainsi. Et je suis restée là, prostrée, à chialer comme si c'était la première fois. Je hais ce virus pourri. Je hais la mort.

Du coup, je ne suis pas allée bosser. J'ai pris ma journée. Pour être franche, j'en aurais été incapable, parce que mon con de cœur a pris soudainement le dessus. Un vrai coup d'état. Comme il occupe les locaux en bon abruti fier de lui, tu dis "choucroute", je chiale. Pas à cause du chou (ça me fil un mal de bide, le chou...), ni de la saucisse ou du lard, gras et indigestes. Non, c'est juste le mot. "Choucroute". Ça me fait pleurer. Tu me dis "rideau", c'est pareil, "salut", c'est la même. Si je ne veux pas pleurer, faut que je dorme. Mais là, c'est le cerveau qui ramène sa fraise. Non, pas dodo ! Enfin, à force de fermer les yeux, ça finit par dormir dans mon corps.

Samedi soir, c'était la fête chez nous. L'anniversaire de la belle blonde (non pas zézette, zézette n'est pas la seule blonde sur cette terre...). Une amie a squatté la chambre d'amie, qui pour l'instant ne sert presque qu'à ça. Sa présence est gravée dans mon esprit : le souvenir agréable avant la série de catastrophes. Elle sait le faire, mais je ne veux pas qu'elle plaide pour mon cas. Mais je pense à elle, là, parce qu'elle doit morfler aussi, pour d'autres raisons, et que comme mon cœur est en autonomie, ça me fait mal qu'elle morfle. Tiens, permettez-moi, je l'embrasse.
Faut que je vous parle un jour de cette amie là, encore une rencontre surprenante. Mais, c'est rassurant de la savoir là. Elle fait partie de ceux que l'on voit trop peu et que l'on aime voir.

Si vous le voulez, vous pouvez raccrocher maintenant. Je vais encore vous parler de ma femme. On se rassure comme on peu.

L'ex de ma femme l'avait bien compris. La vraie méchante des deux, c'est moi. Si Kanou vous regarde et que vous avez le profond sentiment qu'elle en veut à votre vie, c'est juste parce que c'est la meilleure réaction de façade qu'elle ait trouvée pour se protéger. Avec mon petit mètre cinquante deux, et autant de kilos (c'est ce qui s'appelle harmoniser la hauteur et la largeur), moi, je ne fais peur à personne. Ma femme, elle est grande, elle est sportive et ses yeux clairs lui donnent un regard quasi soviétique. La bolchévique, y en a que ça fait flipper. Pourtant, c'est une crème. Elle est calme, elle est gentille. Vous pouvez même la taquiner un peu, la pousser dans ses retranchements, elle ne vous en voudra pas. Elle adore la joute verbale, elle aime les échanges musclés, mais elle ne vous cassera jamais le nez.

Quand on rencontre des gens, au début, ils s'attachent plus à moi. Parce que moins timide, plus bavarde, plus fêtarde et parfois plutôt marrante. Ceux qui s'en contentent finissent sans doute par me trouver un peu lassante, mais n'en disent rien. Ceux qui creusent un peu se rendent compte que je suis une écorchée vive, que j'ai une grande gueule mais que je ne l'utilise pas toujours à bon escient et que ma femme a bien de la patience pour me supporter. Ceux qui fouillent vraiment voient rapidement qu'elle a un cœur qui bat pour deux, qu'elle n'est aigrie de rien et que sa misanthropie n'est qu'un bouclier de roses. Des pétales colorées au reflet et au toucher doux, mais quelques épines pour survivre dans ce monde ingrat.

Elle en a chié. Trop. Alors, le bouclier s'est épaissi, elle se protège plus. Parce qu'elle a rapidement compris que si on découvrait sa gentillesse, elle se retournerait vite contre elle. Le jour où son ex est venue aider sa saloperie de petite amie à déménager tout son foutoir (notre ancienne colocataire, celle qu'on va retrouver bientôt au tribunal), elle lui a dit qu'il n'y avait plus rien de ce qu'elle était depuis moi (enfin le "depuis moi", il n'a pas été verbalement exprimé, mais il était pensé tellement fort qu'on l'a entendu).

Je la malmène. Je ne voudrais pas le faire. Pourtant, j'ai cette putasserie au fond de moi. Elle prend les coups. Elle paye pour tout le monde.

Tiens, d'ailleurs, je vais vous laisser en sa compagnie, pour le prochain post. Ce qu'elle écrit vaut mieux que mes croûtes.

jeudi 15 mai 2008

De la Libre Pensée

J'ai toujours été un esprit libre, du moins c'est ce que je veux bien croire (n'est-ce pas là l'essentiel, après tout ?).
On a bien essayé de me faire croire à des trucs pas possibles, du Père Fouettard à la petite souris, en passant par le lièvre de Pâques... j'avais bien calculé que c'était ma tante qui magouillait tout ça. Il faut dire qu'elle est bonne-sœur, ma tante. Ouep. Ça t'en cale un coin. Mais attention, hein, elle ne se balade pas en soutane-spartiate-et-coiffe, c'est une religieuse en civil, séculière donc, d'un ordre enseignant. Et je crois que je ne connais personne qui ne défende aussi bien qu'elle la laïcité. Tout un paradoxe (finalement, on est tous un peu comme ça dans la famille, des paradoxes à nous tous seuls...).
Du coup, pour faire passer la pilule à mes parents, anti-cléricaux de premier ordre, elle a transformé les symboles religieux (les cloches, jésus, tout ça...) en fêtes païennes. C'est passé. Elle m'a bien emmenée quelques fois à la messe, mais je n'ai pas été traumatisée, vu qu'elle m'expliquait le pourquoi du comment, assis-debout, la bouffe et le pinard (elle n'a pas du beaucoup se recueillir pendant ce temps là... j'dis ça, j'dis rien... je ne voudrais pas balancer !).
Et puis un jour, ma grande copine Céline de ma classe de 10eA est allée au catéchisme... 'tain j'me retrouvais toute seule à faire du patin à roulettes le mercredi matin... j'ai demandé à ma mère de m'y inscrire. Je peux vous dire qu'elle a tiré la tronche. Mais elle a consenti à m'y accompagner, au caté... rapport à la liberté de penser. Bon. Au bout de 3 semaines, l'aumônier a lâché l'affaire : j'étais une forte tête, je n'arrêtais pas de lui pourrir son cours avec mes questions incongrues... sans parler de mes interventions. Mon père avait pris un malin plaisir à m'expliquer comment on pouvait marcher sur l'eau... salée, ou comment on pouvait monter au ciel... en lévitant. Moi, fière de pouvoir la ramener, j'avais tout bien expliqué, même que mon papa, c'est un chimiste, alors... (on est manipulable quand on a 7 ans...). Exit le caté.

Ne crois pas que je ne sais pas où je veux en venir quand je te raconte tout ça.

Je disais donc que je suis un esprit libre. Mon éducation, mes goûts, mes envies, mes études, mes rencontres, tout cela m'a permis de développer mon esprit critique.
Le problème avec l'esprit critique, c'est qu'on ne maîtrise pas toujours ses interventions, on l'ouvre souvent quand il ne faut pas, alors parfois ça peut agacer, vexer, choquer (rayer la mention inutile), d'où quelques sorties mémorables au compteur.
Ce qui me fait réagir, ce sont les interdits alimentaires d'ordre religieux. Je ne suis pas sectaire, mais ça me fait grincer des dents de voir des personnes, à plus forte raison des amiEs, ne pas consommer certains aliments pour "respecter" leur religion... en plus du prosélytisme de l'acte, la pratique religieuse étant clairement affichée à la face du monde, je ne comprends pas ce qui me semble être une aliénation de la pensée à un dogme. Ça ne me gêne pas de manger du poulet plutôt que du cochon, mais ça me dérange d'avoir à faire un menu à part.
Déjà, à l'école, j'ai tapé un scandale à l'heure du goûter : mais pourquoi j'ai pas le droit au nutella ? Pourquoi je suis obligée de me taper des rillettes baignant dans leur saindoux ? J'ai menacé d'entamer une grève de la faim (ouais... c'était du sérieux... parce que pour me priver de bouffer, fallait que je sois vraiment motivée !), lancé une pétition Du nutella pour tous pendant la récrée... consensus mou : on a eu le droit à de la confiture, probablement avec de la gélatine à base de porc... je dis ça, je dis rien... J'ai compris plus tard qu'il était question de religion... en plus c'était en pleine période de la première polémique à propos du voile... et un pavé, un !
Au lycée, j'étais plutôt ni dieu, ni maître, j'ai tranché dans le vif de l'obscurantisme religieux, jusqu'à démonter des témoins de Jehovah venus sonner à ma porte : j'ai sorti LA bible familiale (oui, il y avait dans la bibliothèque familiale, coincé entre le Manifeste et l'intégrale du Génie des Alpages, une bible... paradoxe, oui, mais liberté aussi) et j'ai re-situé tous les extraits des témoins dans leur contexte de l'ancien testament... c'était assez jouissif d'arriver à bout de leurs arguments propagandistes... et pan !
A la fac, j'ai été très à cheval sur mes principes laïcs... lors de mon premier stage sur le terrain, les profs ont demandé si il y avait des régimes particuliers...
- Je ne peux pas manger de protéine bovine...
- Je mange halal...
- Je mange casher...
...
- Je ne mange que du beurre salé... et plaf.
J'ai eu le droit à ma plaquette de beurre salé à chaque stage... et toc.
Ça m'a quand même choquée qu'on puisse imposer à toute une collectivité de telles contraintes, question organisation, c'est vraiment pas simple... sans parler du mélange entre sphère privée et sphère publique.
Comme ça m'a choquée que certains de mes élèves, l'autre jour pendant une perm', me soutiennent que c'était Dieu qui avait créé le Monde... et qu'est-ce qu'on fait de l'évolutionisme et du Big-Bang ? Je les ai choqué en leur affirmant que je ne croyais pas en dieu, mais en la Vie et la Raison.
J'ai choqué mes collègues en refusant juste avant le ramadan de distribuer un papier pour informer les parents que si leur gamin préférait s'affamer pour se purifier, il devait prévenir l'intendant pour ne pas payer les repas de cantine. Ils n'ont qu'à assumer, l'Ecole de la République n'a pas à encadrer une pratique religieuse... et re-plaf.

Rien à voir avec le tube de Pagny, non, mais de l'esprit libre à la Libre Pensée, il n'y a qu'un pas.
Ça ne m'empêche pas d'avoir des amiEs pratiquantEs... je te l'ai dit, je ne suis pas sectaire... je respecte leur pratique et ne les juge pas pour autant (même si j'ai du mal à le comprendre)... je fais attention à ne pas faire d'impair, entre coquillages et crustacés, sabots fendus et cochon, je ne suis pas très familière avec tout ça : je mange de tout, sauf de la bouffe crue (et de la bouffe chinoise aussi... c'est pas que j'ai pas confiance, mais les odeurs m'écoeurent, c'est comme ça).

Aujourd'hui j'étais en grève, parce que supprimer des postes, c'est aussi réduire un peu plus la chance de semer la graine de l'esprit critique et de la liberté dans la tête de nos enfants.
J'étais partie pour manifester, j'avais même pensé à quelques slogans, en vrac :
Xavier Darcos, t'es trop craignos
Ta réforme elle est pourrie, c'est pour ça qu'on pousse un cri !
ou
Xavier Darcos, t'es trop nullos
J'te dis C.A.C, crainri c'est à chier !

MaB a bien proposé
Xavier Darcos, t'es qu'une lesbos
Tu t'mets un doigt avec ta réforme caca !

mais c'est plus pour la rime, hein ! Pas de méprise ni d'accusation abusive !


Bon... j'ai du prendre un cacheton contre l'allergie, et j'ai commencé à somnoler sérieusement en sortant d'un déjeuner (dans un resto vietnamien, vous voyez que je ne suis pas sectaire !) avec MaB et Zézette... j'ai lutté, j'ai pris un café, un bonbon à la menthe, mais je suis rentrée pour m'écrouler comme une fiente sur le dos de Zeste sur le canapé pendant une heure.
Mouais. Il n'a même pas plu, y'avait du monde, les médias ne parlent que de service minimum et pas des revendications... pour la peine, je regarde la Nouvelle Star, et savoure ma satisfaction d'être admissible au concours de prof des écoles !

Zezette la blonde !

Dans l'agence où je travaille, il y a une assistante. L'assistante est un peu la poulie, la charnière et la locomotive d'une agence immobilière. Elle se charge de l'accueil (téléphonique et physique), du secrétariat, de la comptabilité, des locations et tient également le bureau des plaintes et des pleurs, ouvert aux clients, mais aussi, au personnel.

Notre assistante à nous, elle est grande, elle est blonde et elle est jolie. Mais surtout, elle est blonde. Et du coup, souvent très drôle. Ce qui me stupéfait le plus chez elle, c'est sa constance...

Allez, juste une anecdote pour illustrer mon propos. Un matin d'après câlin avec son copain (je suis pas certaine que ce soit toujours le même...), il la regarde et forme le chiffre neuf en lui montrant neuf doigts. Elle ne voit pas bien où il veut en venir et finit par lui répondre d'une voix stridente :"quoi ???? tu veux que je prenne neuf kilos ??? non, mais ça va pas le faire là !". Lui d'insister, elle finit par comprendre, que non, il ne s'est pas trompé, leur relation ne dure pas depuis neuf mois et qu'il lui propose de lui faire un bébé. Ce que, bien entendu, elle a refusé.

Hier, elle a lu ma bafouille sur la prévention dispensée par les associations dont je ou j'ai fait partie. Le manège à quequettes lui a rappelé un souvenir. Dans son lycée, alors qu'un intervenant expliquait que la taille moyenne en érection d'un sexe européen était de tant de centimètres (me rappelle plus du chiffre), sa voix claire a transpercé la salle et tout le monde a pu apprécier son "c'est tout ?!".

J'avais plein d'autres anecdotes, mais je préfère vous les livrer, çà et là, dispersées dans mes bafouilles.

M'est d'avis de toute façon, qu'elle joue sa blonde pour qu'on lui foute la paix et qu'elle est beaucoup plus intelligente qu'elle veut le faire croire.

Elle est adorable, elle a le coeur sur la main et les pauv' gars du quartier l'ont bien compris parce qu'ils ne la lâchent pas. J'attends avec impatience le jour où Gérard posera un genou sur le trottoir et lui tendra la main pour la demander en mariage... Je me bidonne d'avance !

J'aime ses taquineries, ses petites boulettes verbales, ses blagues nulles. Sa façon de me dire que Satan est dans ma culotte quand ma femme est partie une semaine en Bretagne et que j'ai hâte de la retrouver.

Et puis, elle fait vraiment du bon boulot.

Aujourd'hui, c'est son anniversaire.

Bon anniversaire ma Zezette !

Et puis, y a une autre bonne nouvelle aujourd'hui : ma femme est admissible !

mardi 13 mai 2008

Les messagers

Pour paraphraser Alice dans The L Word, je suis une "gold butch", ma femme aussi. Ce qui signifie que nous n'avons jamais eu de rapports sexués avec un homme. Je ne m'en flatte pas, ni ne m'en défends, c'est ainsi.

J'ai bien embrassé mon meilleur ami, il y a quelques années, mais c'était parce que lui était gay et moi lesbienne et qu'on voulait quand même être surs que bon, on faisait pas une connerie. On a jamais osé mettre la langue et on s'est dit que ouais, c'était pas notre truc (enfin, lui, il a fini par se marier avec une fille...mais je le soupçonne d'avoir eu quelques amants...).

Cependant, j'ai eu de très forts sentiments pour quelques hommes. Olivier, que j'ai aimé comme un frère, Ivan qui était mon jumeau et mon ange gardien, Yohann qui était le plus tendre des amis, Baptiste qui m'a fait découvrir tant de choses, Steeve, toujours en décalage horaire, Fredo qui change de mari comme de slip (quoique là, ça doit faire six ans qu'il porte le même caleçon...), Charlie, pour qui j'éprouve une immense tendresse. Bref, des gars biens.

Dans le lot, un seul était hétéro, mais je vous jure que je ne l'ai pas fait exprès. Il n'est plus de ce monde, abattu par une saloperie qu'on guérit très bien aujourd'hui. C'est ainsi. Dans le lot, également, un d'entre eux n'est plus là pour savoir que je suis devenue une femme moderne et que j'écris dans un blog. Beaucoup d'autres l'ont suivi et même si je n'avais pas la même complicité avec eux, j'espère qu'au Paradis, il y a une connexion Wifi. Un d'entre eux est aussi en train de nous quitter, pour les mêmes raisons, la même bêtise, le même oubli. Et là, pour une seule fois, je vais me permettre d'être grossière, parce que putain ça fait mal, sortez couverts bordel, faites ce que vous voulez de votre cul, de votre fouf' et de votre zgeg mais, sortez couverts !

Mais ce n'est qu'une pâle introduction à mon sujet, ce dont je voulais vous faire part, c'est de mon expérience associative.

La première fois que je me suis engagée dans une association, c'était AIDES. On me piquait mes potes, j'étais piquée à vif et prête à changer le monde et les mentalités pour prolonger la vie. Comme j'avais plutôt un bon contact avec les gamins, on m'a envoyée leur raconter des histoires dans des hôpitaux. Seulement, je n'étais pas foutue de ne pas m'attacher, les voir malades me bousillait, alors j'ai arrêté. J'ai pris conscience une fois de plus de mes limites. Et puis, j'ai tâté la prévention. Les journées dans les collèges et les lycées à présenter avec fierté et humour mon beau manège de quequettes. A expliquer comment pincer un réservoir, ouvrir le petit sachet sans esquinter son contenu, dérouler la capote sur le bestiaud avec doigté. Un vrai boulot de lesbienne quoi !
Plus tard, lors d'une de mes prestations scolaires, j'ai rencontré une fille qui faisait la même chose que moi, mais qui elle, prévenait des dangers et de la cruauté de l'homophobie et du racisme. Le concept m'a plu. J'ai rejoint le mouvement. Prévenir pour ne pas avoir à guérir. Je trouvais l'idée plutôt bonne.

Quand vous vous vous retrouvez face à une bande de lascards qui sont morts de rire, avant même de rentrer dans la salle, en s'imaginant la follasse et la gouine qui vont leur apprendre à ouvrir leurs esprits, j'aime autant vous dire que c'est pas gagné d'avance. N'allez pas croire tout de même qu'on est jetés dans le grand bain sans armes, ni armure, on est formés et fin prêts. On a dans notre besace tout un tas de réponses toutes faites, prêtes à surgir en cas de questions débiles ou pointues. Les questions, elles viennent après notre petit discours et c'est le moment que je préfère, pardonnez ma soif de torture... Pardonnez-moi aussi ma familiarité, parce que, il me parait plus simple de vous tutoyer (on se connait un peu maintenant, je me permets).

- Dis Madame (j'adore quand ils m'appellent Madame...), pourquoi t'es devenue lesbienne ?
- Hum, je crois que je l'ai toujours été...
- T'as jamais....
- Non, j'ai jamais...
- Et toi, m'sieur ?
- Non plus.

Là, si tu es prof, tu as compris comment rétablir le silence dans une salle, où ont été réunies trois classes de trente élèves... Ca finit tout de même par chuchoter dans le fond...

- Et vous faites comment entre filles pour niquer ?
- Pour faire l'amour, tu veux sans doute dire ?
- Ouais.
- On fait. Tout va bien.

Là, tu sens un observatoire déconfit, terriblement déçu de n'avoir pu passer outre le contrôle parental sur les chaines du câble.

- Dis Madame, à quel âge t'as eu ta première copine ?
- Ma première copine, je devais avoir trois ans, ma première petite amie quatorze.
- Quatorze ????

Là, tu sens un léger malaise s'emparer de l'assemblée, dont c'est l'âge moyen.

- Mais comment tu l'as rencontrée ?
- En colo.
- Rhôôôô et vous avez dansé ensemble et tout ça ?
- Non, nous sommes restées très discrètes, nous avions peur de finir lapidées !
- Ca veut dire quoi "lapidées" M'dame ?
- Ca veut dire massacrer quelqu'un en le visant avec des pierres.

Là, tu as toujours une âme sensible qui trouve ça super violent et pas du tout approprié, surtout que sa mère lui a dit qu'on relâchait des salauds qui avaient pas purgé la peine de prison adéquate à leur crime. Donc, tu ne t'emballes pas, tu ne pars pas dans une diatribe sur les conditions d'incarcération, tu restes dans le sujet.

- Certains pays punissent encore l'homosexualité de lapidation.
- Sérieux ?
- Oui.
- Moi, ça m'excite deux meufs ensemble !
- Je suis ravie de contribuer à la construction de tes fantasmes.

Et là, tu l'as mouché le petit con, je peux te le garantir. Mais bon, tu ne lui en veux pas, parce qu'au passage, t'as noyé deux ou trois réflexions embarrassantes. C'est pour ça qu'on t'a bien expliqué que c'était de la prévention.

- M'sieur tu te fais enculer ?

Le rire général est inévitable. Le rire moqueur, le rire gêné, le rire haineux, c'est un peu brouillon, tu ne sais pas vraiment lequel l'emporte. Mon homologue masculin y est heureusement préparé. Je sens malgré tout qu'à chaque fois, cette question l'emmerde profondément.

- Oui.

Là, tu sens qu'ils voudraient bien en avoir plus, que c'est un peu court comme réponse. Mais personne n'ose développer, par peur de passer pour un pervers, le plus souvent.

- M'dame, t'as une copine ?
- Oui, j'ai une compagne.
- Warfff c'est un truc de vieux "compagne" !
- Ta mère, elle dit quoi quand elle parle de ton père, que c'est "son compagnon", "son mari", "son petit ami" ?
- Elle dit "l'aut' con".

Là, je t'ai montré que c'est super facile de tomber dans le piège, de t'envoyer dans la tombe à peine sortiE de l'oeuf. C'est la règle, la première qu'on te met dans le crâne : ne jamais répondre à une question par une question.

Non, là, il fallait dire.

- Oui, je ne peux pas dire qu'elle est ma petite amie, parce que nous vivons ensemble, en famille et je ne peux pas non plus dire qu'elle est ma femme, parce que nous n'avons pas le droit de nous marier. Donc, par élimination, elle est ma compagne.
- T'as pas le droit de te marier ?
- Non, la loi ne me l'autorise pas.

Là, tu pourras distinguer, portés par le brouhaha jusqu'à tes oreilles : un "c'est nul", un "putain", un "encore heureux" et un "ta mère la pute", d'une élégance rare.

- Il y a d'autres questions ?
- Ouais, m'dame.

Là, tu la vois bien la gamine qui n'est pas bien dans sa peau. Tu l'imagines se tortiller les orteils dans ses chaussettes. Tu vois qu'elle n'en mène pas large et que sa question, ça fait une heure qu'elle fait son chemin dans sa petite tête. Tu sens le malaise. Tu sais que cette gamine là, c'est la seule de ce foyer pourri (les notres étaient vachement mieux, y avait des tables, un piano, un distributeur de boissons...) qui a réellement besoin de toi.

- Je t'écoute.
- Comment tu sais que t'es... homosexuel ?
- Je l'ai su au premier baiser, Ludovic, qui est assis à côté de moi, c'est quand son cerveau le lui a dit. On peut tous avoir une réaction et une approche différente. Comme n'importe qui, parce que nous sommes n'importe qui. Mais on le sait un jour, on finit toujours par le savoir, il faut juste écouter son coeur.

Là, la gamine, elle est tout sourire. Elle sait juste que ça viendra, que c'est tranquille. Elle se dit même que, grâce à nous, ce sera peut être plus simple et son âge l'autorise à y croire.

J'ai été arrêté le 13 mai 1988 pour attentat à la pudeur sur la voie publique et comportement aliéné parce que j'embrassais ma petite amie sur le trottoir. Certes, c'était un baiser fougueux et langoureux. J'ai été "condamnée" à un an de suivi psychiatrique, qui n'a rien donné, si ce n'est confirmé, qu'en effet, j'étais attirée par les femmes. Le 4 août 1982, l'homosexualité était dépénalisée, le 17 mai 1990, l'OMS la retire de la liste des maladies mentales. On a fait une chouille d'enfer.

Alors, non, je ne me considère pas comme une porte-drapeau, oui, je n'ai jamais couché avec un homme. Pour autant je les aime tendrement, comme j'aime tous les gens biens. Je ne voudrais surtout pas qu'on me croit propagandiste ou Mère Théresa de la Sainte Pédégouine.

Dans quelques jours se tiendra la journée mondiale contre l'homophobie. Le 17 mai.

dimanche 11 mai 2008

Petit machisme et grands sentiments !

Ma femme, ma délicieuse, mon ange d'amour est une macho.

Entendons-nous bien, je n'aime pas les raccourcis et vous l'aurez compris. Le machisme n'est pas réservé à la gente masculine. Les femmes peuvent à leur tour redoubler de talent quand il s'agit de faire mousser leur petite supériorité.

Quand je vous dis qu'elle est macho, comme ça, sans argument, j'en vois certains qui soulèvent leur sourcil gauche en marmonnant "mouohh elle exagère". Bon, ok, je veux bien admettre qu'il m'arrive d'en rajouter un peu, mais là, non.

Une femme est sur le point de traverser la rue, qu'elle soit petite, grande, vieille, jeune, belle ou moche, elle s'arrêtera et la laissera passer. Je vais faire les courses, c'est mon job, mais elle vient toujours me chercher pour m'aider à porter les sacs et elle se charge comme une pauvre ânesse condamnée à l'état de bête de somme pour que je ne me retrouve qu'avec les rouleaux de papier hygiénique et le sac qui contient de petites choses toutes légères. Elle me protègera en toutes circonstances, prête à risquer sa vie pour la mienne (bon là, peut-être que j'en fais un peu trop). Elle me tient toujours la porte avec une élégance digne d'un séducteur italien. Je n'ai pas mon permis, mais quelque part, ça l'arrange, parce que si je l'avais, je ne sais pas si elle me laisserait conduire la voiture. Pire encore, elle rêverait d'avoir l'audace de siffler les filles...

Ce petit machisme a cela de bon que je me sens vraiment en sécurité. Quand je suis à se côtés, je ne crains rien, ni personne. C'est également très flatteur, parfois, j'aurais presque envie de crâner un peu. Oui, parce que si ma femme est un tantinet macho, il serait juste de dire que je me la pète quand même pas mal. C'est aussi très sexy et cela peut, à l'occasion, réveiller mes ardeurs les plus animales.

Mais ce petit machisme peut s'avérer quelque peu agaçant, surtout lorsqu'elle y ajoute son autorité naturelle, du style "je te le dis tu le fais". Ou, quand son machisme me rappelle la multitude de choses que je ne sais pas faire seule et là, c'est la confiance en soi qui en prend un sérieux coup derrière les oreilles.

Mais elle sait aussi, de son air le plus distant (non, non, la macho ne montre pas qu'elle est aussi sentimentale...) me dire que je suis belle (l'amour rend aveugle), que mes quelques kilos de trop me rendent voluptueuse (ben voyons) et que mes talents sont nombreux (ce dont personne ne doute, bien entendu). Elle sait allier ses attitudes rustres et viriles avec un humour décapant et pince-sans-rire, qui me fait mourir de rire.

La macho peut à son tour s'avérer être une véritable fleur bleue au romantisme démesuré, mais vous n'en saurez rien, à moins de la connaître suffisamment pour savoir quelle corde sensible chatouiller.

Oui, ma femme est une macho au coeur tendre et j'aime ça.

Et vous, macho ou midinette ?

Des mots, des maux ?

Je devais avoir huit ou neuf ans quand j'ai écrit mon premier poème. Un truc insipide et aussi plat que ma poitrine à cette époque. Bien que ce résultat des plus mièvres ne fut pas des plus encourageants, j'avais pris un certain plaisir en réalisant cet exercice. Je me mis donc à écrire. Au début très occasionnellement, puis presque quotidiennement. J'aimais vraiment cela. Je voyageais du stylo, inventant des personnages, des histoires, des situations improbables. Si bien qu'à quinze ans, j'avais déjà écrit mon premier roman. Le personnage principal était une adolescente qui racontait ses déboires pendant une colonie de vacances où ses parents l'avaient envoyée de force. Ses premiers émois, son trouble lorsqu'elle découvre son attirance pour une jeune femme. Autobiographique ? Presque... A la différence près que c'est moi qui saoulais mes parents pour qu'ils m'envoient en colo. Trois semaines sans eux, mon petit paradis annuel.

Tout en écrivant ce roman, je continuais à pondre des petits poèmes. Mon style s'améliorait un peu, mais nul ne pouvait douter, en les lisant, que ces quelques lignes étaient l'oeuvre d'une enfant de quinze ans. J'étais en seconde. Je me souviens d'en avoir écrit un petit sur une table pendant un cours de maths (je sais, c'est pas bien de dégrader le matériel scolaire...)

Vivre pour oublier
Et oublier que vivre
C'est d'abord oublier
Ce que l'on a pu vivre

Je ne saurais pas vous dire pourquoi je me souviens parfaitement de ces quatre vers. Mais je m'en souviens. J'ai été très surprise lorsqu'une copine de classe me l'avait montré au début de son cahier de textes, en disant "j'ai vu ça sur une table, c'est beau hein ?". Je n'ai pas osé lui dire que c'était de moi. Elle ne l'a jamais su.

Deux ans plus tard, en Terminale donc, j'en étais déjà à mon troisième bouquin. Le second racontait la vie d'un homme, la même, mais déclinée sous la forme de différentes petites nouvelles. Je jouais dans une adaptation d'"Exercice de styles" de Queneau cette année là, je m'étais inspirée de l'idée. Mais plutôt que de raconter plusieurs fois la même histoire en changeant les mots, je racontais la même histoire en changeant les lieux, les circonstances et l'époque. Dans le troisième, j'avais imaginé que le personnage principal, encore une jeune adolescente, avait jeté une bouteille dans la Seine avec son adresse et entretenait par la suite, une correspondance passionnée avec une personne qu'elle ne connaissait pas. Elle finirait par la rencontrer et s'enfuirait avec elle au bout du monde.

Puis, je rentrais à la fac, un quatrième livre dans ma besace. Il racontait l'histoire d'une jeune vedette de cinéma adulée mais profondément torturée. Un personnage qui, tout comme moi, vivait d'excès. Sexe, alcool, poppers et art. Comme je n'avais pas de maison, j'écrivais dans les parcs l'été et dans les bistrots l'hiver. J'avais d'ailleurs fini par sympathiser avec un cafetier qui me proposa de faire quelques extras pour lui.

Ensuite, j'ai commencé à travailler. Deux autres romans avaient rejoint les quatre premiers. J'avais moins de temps libre. Mais, mes trois premières fiches de paie m'avaient permis de trouver un appartement, alors j'écrivais un peu tous les jours, chez moi.

Les années ont passé et la dizaine dépassée.

Ecrire est un doux échappatoire, mon assurance vie depuis toujours. Le seul moyen que j'ai trouvé pour fuir ma propre vie est de créer celle des autres. La modeler, lui donner un souffle et exister à travers elle.

Aujourd'hui, ma vie va bien. J'ai une femme formidable, des amis, un chat, ma santé se maintient, mes projets vont bon train. Pourtant, j'écris toujours, mais je ne suis plus motivée par les mêmes raisons. Je me fais juste plaisir. Je varie les genres : poèmes, romans, contes, nouvelles et j'ai même l'idée, quand mon roman en cours sera terminé, de m'attaquer à un "petit manuel à l'intention de la jeune lesbienne" que j'imagine déjà très drôle, un peu décalé, mais truffé de réalités.

De tous ces cahiers d'écolier que j'ai rempli, il ne m'en reste que deux. J'en ai aussi un troisième, l'un des plus récents, qui a été directement tapé sur ordinateur. Tous les autres ont été offerts ou jetés. Il a fallut que je me sente bien dans ma peau pour commencer à conserver la vie des autres.

Ma femme est le trésor de mon existence. Elle m'a réconciliée avec moi-même. Si bien, qu'aujourd'hui j'accepte que d'autres lisent ce que j'ai écrit même si je ne les connais pas. Si bien, que je me sens finalement presque heureuse de me dévoiler. Si bien, que désormais la vie des autres est bien celle des autres et que je n'ai plus besoin de me l'approprier pour apprécier la mienne.

Et vous, qui me lisez ici, et que je lis, pour certains, pourquoi vous écrivez ?

samedi 10 mai 2008

Du milieu, mais à gauche

Il est des rencontres comme ça qui vous font dire que non, finalement, le monde n'est pas rempli seulement de personnes sectaires, vides d'intérêt et/ou carrément connes. Même qu'on vit à côté d'elles, sans le savoir, et qu'un jour, on se retrouve à papoter sur un balcon à 2h du mat' tandis que sa drôle roupille sur le canapé.
La toile c'est bien pour ça aussi : on y fait de belles rencontres, qui arrivent sans prévenir, surprenantes autant que passionnantes, dont on a l'impression que ça fait 5 min alors que ça fait 7h de papotages intensifs, et qui laissent sur notre faim.

Hasard ou inconscient actif, MaB et moi ne fréquentons essentiellement que des lesbiennes... c'est comme ça. En couple ou célibataires, les rencontres ont fait que... ça n'est pas pour autant que nous fréquentons et/ou appartenons au milieu.
Aaaaah le milieu... tout le monde en parle, mais sait-on vraiment ce qu'il est ? Existe-t-il vraiment, à ce propos ?
En ce qui me concerne, je n'ai jamais fréquenté les bars et boîtes lesbiennes de la place de Paris avant de rencontrer MaB...
A part une bière avec mon meilleur pote de l'époque aux Scandaleuses (actuel 3W) quand j'avais 16 ans...
A part la fois où ma pote de hand m'a traînée au Pulp... elle m'a invitée, je n'ai pas pu refuser (il faut dire qu'on se dragouillait à moitié à c't'époque... on est finalement restée potes, et c'est très bien !). Même si ça me fait marrer aujourd'hui, ce fut une expérience flippante : agoraphobe sur les bords, à force de picoler au bar pour oublier la teneur inconsistante des propos de nanas qui se frottaient à moitié à moi, j'ai du atteindre THE endroit stratégique d'une boîte, les chiottes (nan nan, je ne vous fais pas de schéma). Entre le zinc et les cuvettes, la piste de danse. Blindée de nanas toutes plus mortes de faim les unes que les autres. Angoisse sur le moment. Avec le recul, je me dis que j'aurais p'têtre du en profiter... mouais. Toujours est-il que j'ai survécu à la traversée, pour m'entendre dire par la dame pipi revêche que pour le PQ c'était payant. Connasse.

Au début, lorsque j'ai enfin osé passer le pas et ramener une fille chez mes parents, je n'ai pas fait de coming-out... un jour ma mère m'a demandée, quelque peu excédée par mes pètages de plombs réguliers, quand est-ce que j'allais virer ma cuti (sic)... gloups... ben c'est déjà fait hein (j'ai du embrasser ma première petite amie 15 jours avant). J'avais 21 ans. Ça, c'était fait.
Mes potes de l'époque, c'était ou des handballeuses, ou des potes d'écoles devenus grapheurs ou rappeurs. Il se trouve que les coéquipières avec qui je m'entendais bien en dehors des terrains sont lesbiennes... même ado. Les potes m'ont fait un aveu, un soir de fumette, c'était pas comme avec les autres filles, avec moi, ils pouvaient discuter et déconner... ben ouais, fais tourner, gros !
Et puis j'ai rencontré MaB... internet, encore... on a fait ces soirées mémorables, 40 lesbiennes qui chouillent dans une baraque, c'est énorme ! Tout le quartier savait, on était LES lesbiennes de la maison qui fait l'angle.
Ma mère s'est inquiétée de voir que nous ne fréquentions que des lesbiennes, tout ce qu'on faisait c'était avec des lesbiennes, on allait sur un forum de lesbiennes... elle avait peur de cette image de la communauté lesbienne radicale, de cette image de ghetto. Bon. Elle n'avait pas tort.
De cette période (plus d'un an), il nous reste une belle amitié avec un couple d'amies. Elles sont lesbiennes, et alors ?

Ça n'est pas pour autant que nous faisons partie du milieu lesbien, a fortiori parisien.
Ben ouais.
On peut n'être pote qu'avec des lesbiennes, ou presque, et ne pas faire partie du milieu.
Ben ouais.

Les soirées électro du Tryptique ou punk radical de feue la Barbare, c'est pas mon truc.
Le masturbage de cerveau sur des textes vides de sens et/ou alambiqués, soit disant géniaux, sous prétexte que les auteurEs sont lesbiennes... bon, après, ça n'est qu'une question de goût, très personnelle et donc subjective, mais je ne comprends pas ce qu'on trouve à Nina Bouraoui pour ne citer qu'elle... c'est pas mon truc non plus.
La biphobie ou la transphobie... tout un poème... qu'est-ce qu'une vraie lesbienne ? Le rejet de certaines par des nanas qui ont eu un vécu hétéro qu'elles rejettent aujourd'hui, ça non plus c'est pas mon truc.
La mysandrie véhiculée par un certains nombres de lesbiennes radicales non plus.
N'est-il pas étrange d'entendre de la bouche de certaines des propos on ne peut plus sectaires, alors qu'elles, nous, souffrons de l'intolérance latente d'une grande partie de la société ?
Je n'ai rien à reprocher aux hommes de ma génération, individuellement. Collectivement, c'est un autre sujet. Oui, le pouvoir est détenu en majeure partie par les hommes... cette situation existe depuis la nuit des temps... et après ? On peut lutter contre cette inégalité entre hommes, hétéros ou homos, et femmes sans reproduire la même violence. Et plutôt que d'agir contre, je préfère lutter pour... question de vision de la vie, de verre à moitié plein ou à moitié vide, tout ça.
Alors j'en entends certaines qui vont dire que je ne suis qu'une traitre, qu'une jaune, que je ne soutiens pas mes sœurs dans LA cause et que je ne fais que reproduire le modèle hétéronormé, avec une femme, un chat, une vie de couple plutôt rangée et un désir d'enfants.
Certes. Ça n'est pas pour autant que j'oppresse ma femme et inversement. C'est même justement très excitant de se dire qu'on construit quelque chose de nouveau, une nouvelle forme de famille, mais avec les mêmes soucis que n'importe quels couples... le ménage, les courses, la lessive, les comptes et éventuellement les enfants.

Tout ça pour dire que même si un homme ne partage pas mon quotidien ni mon lit, ils me sont essentiels, à commencer par mon père, rapport à la petite graine.
Et puis mon frère, adorable, brillant, un poil macho, beau gosse sur la réserve...
Et puis tous les autres gars de la terre, tant qu'il y a du respect, y a d'la joie !

vendredi 9 mai 2008

Cétacé...

J'ai jamais voulu avoir d'enfant. Enfin, je veux dire "physiquement". J'étais pas attirée par les joies de la grossesse. Avoir un bide énorme, pisser cent fois par jour, commencer mes journées par un petit vomi tout chaud. Avoir les seins lourds et le dos en bouillie, les pieds qui gonflent, les contractures, la migraine. Devenir cyclothymique, obsessionnelle et paranoïaque. Non, ça ne me faisait pas fantasmer.

Et puis, il se trouve que je suis une fervente adepte de la Loi de Murphy et que, par dessus le marché, j'ai hérité de la poisse paternelle. Donc, forcément, j'aurais eu droit au pire, y compris l'alitement obligatoire pendant, allez, au moins six mois.

Je vous assure, c'est vrai. Je n'en rajoute pas ! Vous voulez des preuves ? Ok, vous allez être servis.
Le jour de mes trente ans, c'était le 11 septembre 2001. Ca ne vous rappelle rien ?
Pas convaincus ? Ok, je vous en mets une autre...
La première fois que j'ai invité une fille au restaurant, j'ai oublié ma carte bleue à la maison !
Facile ? Vous voulez mieux ? Ok.
Je me prends régulièrement les portes, les baies vitrées et les boites aux lettres en plein front. Je trébuche à la moindre irrégularité du sol et je suis une grande spécialiste des entorses. Mes collègues et quelques amis me surnomment le Pierre Richard au féminin.
Vous commencez à me croire là ? Bon...

C'est, consciente de cette tare génétique contre laquelle il m'est impossible de lutter, que j'ai, très jeune, fait savoir à qui voulait bien l'entendre que, le moment venu, j'adopterais.
Bien souvent, on m'a répondu que je changerais d'avis, que j'étais femme et que ça finirait par me titiller l'utérus. J'ai également subi les grandes phrases riches de sens, qui de "la chair de ta chair", qui de "le petit toi qui vient de toi" etc etc... Je trouvais ça hyper réducteur comme concept. Pourquoi fallait-il à toutes fins qu'un enfant soit mien que s'il venait de mes entrailles. Et "la chair de mon âme", on en fait quoi ?

Je voyais les choses comme ça. Connaître les plaisirs de la maternité en zappant le passage réservé aux femmes, la grossesse.

J'ai pas changé d'avis, évolution : zéro. Si, j'ai évolué mais pas la dessus. Du statut de gouinette libre et délurée, je suis passée à celui de femme mariée, comblée, épanouie et amoureuse. Pour autant, mon utérus est resté bien peinard, ça l'a pas réveillé du tout, tout cet amour.

Ce que j'aime bien, c'est m'asseoir à côté de la baignoire quand les gamins de mes potes y sont et tenter avec eux de couler l'insubmersible, Sophie la girafe. Ce qui m'éclate, c'est de voir un petit bout de cul battre le vent à la course et s'en réjouir. Ce qui me fait rentrer les talons dans le sol, c'est quand j'entends de la bouche d'un enfant, ce que moi, adulte, je serais bien incapable de formuler avec des mots aussi justes. Ce que je leur envie, à ceux qui ont des bambins, c'est de me sentir si importante. Me lever la nuit parce que le mauvais rêve est le champion de leur sommeil, changer une couche en beuglant du Piaf parce que ça me bouche les sphincters. Et puis, les regarder grandir, presque trop vite en jouant mon coq (oui, ma poule ça le fait moins...), parce qu'ils continuent à avoir besoin de moi.

Bon, si vraiment ça vous fait plaisir, si vraiment vous en rêvez tout éveillés, je veux bien consentir à l'allonger sur mon ventre ma crevette, "sur" pas "dans", que ce soit bien clair !

Ils persistent et signent les donneurs de leçon ou je les ai calmés ? Ils arrivent à faire suffisamment mouliner leur cerveau embourbé pour comprendre que de ne pas vouloir être une mère, ça ne vous rend pas moins femme ?
Oui, je suis une femme, mais vous n'aurez pas la chance de le vérifier par vous même !

Je sais pas si vous avez remarqué mais Pierre Richard, malgré ses innombrables bourdes et autres effets de manches, il finissait toujours avec la plus belle fille du film. Je me souviens tout particulièrement de La chêvre où il finit quand même par se taper Corinne Charby, le saloupiaud ! Etre son pendant en version femelle n'a pas que des inconvénients. Moi aussi, j'ai fini avec la plus canon du casting.

Et figurez-vous que son utérus a elle, il marche trèèèès bien. Il est même super en forme. Il lui cause. Il lui dit des mots bizarres et doux. Elle veut jouer sa baleine, qu'elle s'éclate, ferme. Juste, qu'elle ne se réserve pas qu'à son baleineau parce que je veux bien récupérer ma sirène après.

Finalement, je vais adopter le sien.

mercredi 7 mai 2008

La Butte Rouge

Ah, Paris la Belle, Paris la plus surprenante des femmes. Tantôt mondaine, tantôt putain. Sensuelle et vulgaire, bourgeoise et miséreuse. Femme fidèle et douce. Femme mystérieuse qui s'offre à l'inconnue avec l'ardeur d'une pucelle. Paris, je suis ta maîtresse féline, je longe tes courbes, flatte tes ponts et te suis toute soumise.

Oui, un peu de parisianisme ne fait de mal à personne. Alors, je profite.

Il y a dans Paris quelques quartiers qui me tiennent particulièrement à cœur. Quelques petits coins de paradis que j'ai appris à apprivoiser à force d'insistance.

Ce soir, je vais vous parler du 18ème, où j'ai laissé mes tripes pour offrir mon cœur. D'où Kanou m'a arrachée non sans mal et pour mon plus grand bien.

Le 18ème se dessine en 4 gros quartiers : La Goutte d'or et ses effluves d'épices qui se mélangent aux senteurs des fruits noirs et malodorants, La Mairie, quartier du commerce, des quatre saisons et de mes amis les chats, Montmartre et ses allures de village de Provence, ses rues torturées et ses immeubles qui semblent vouloir imiter la Tour de Pise, le quartier Caulaincourt et Grandes carrières, noyé sous immeubles de bonnes familles et ses étranges surprises.

Suivez la guide et n'oubliez pas le petit commentaire à la fin.

La Goutte d'or :
Si l'or est son précieux métal, c'est parce qu'à lui seul ce bout de ville est le coeur de Paris. Vous apprécierez le marché Dejean et ses poissons dont vous ignoriez jusque là même le nom. Vous aimerez, j'en suis sure, le triangle des Bermudes, qui sur une placette, réunit une synagogue, une mosquée et une église. Vous marcherez sur le boulevard Barbès et caresserez cette frontière en savourant le trottoir de droite et celui de gauche. J'habitais au bout de celui de droite, le côté maudit, celui du crack et des magasins afro. Vous avez déjà bu du rhum à 60° ? Non ? Moi si.
C'est aussi là que j'ai rencontré Aboubacar qui a réveillé ma conscience politique et Olivier, le poupon du PPF (paysage politique français).

La Mairie :
Des familles, des enfants, des écoles, une église et un marché. L'église où se sont mariés Piaf et Cerdan. Promenez vous un peu dans le marché du Poteau, vous irez ensuite vers la rue du Mont Cenis et vous donnerez tout son sens au mot "pente". Là, sur votre droite, un minuscule donjon, avec son toit tout pointu habillé de tuiles gris-bleues. C'est une boîte de nuit, qui justement s'appelle le donjon, mais je ne sais pas si je dois vous la conseiller. Je dois quand même vous le dire, c'est une boîte S.M.

Caulaincourt/Grandes carrières :
Vous êtes partis de la Goutte d'Or et si vous avez suivi ma route, vous êtes maintenant Rue Custine. Remontez sur votre droite pour gagner la Rue Caulaincourt. Là, vous êtes dans un amphi d'histoire de l'Art et on vous enseigne le fleuron de l'architecture haussmanienne, du dit Baron. Pierres de Taille, parquet, moulures, cheminées. Si vous le pouvez, faîtes le la nuit et allez-y, faîtes vous plaisir, matez chez les gens, tout le monde le fait. Le 18ème, il est comme ça : les rues en pente sont très en pente, les coins sombres sont très sombre, ce qui est glauque devient glauquissime et les hauteurs sous plafonds sont très impressionnantes.
Enfin, vous prendrez à gauche et arpenterez l'Avenue Junot. N'oubliez pas de tourner à droite dans la Villa Léandre, au fond à droite, la maison bleue. La maison de mes rêves, celle que je veux mienne depuis l'âge de 14 ans. Imaginez que si vous posez votre derrière dans votre jardin pour boire votre café du matin, votre nez touche la pointe des invalides. Le petit côté Notting Hill ne vous échappera pas et vous serez séduits.

Montmartre :
En Frison Roche urbain aguerri, vous attaquez la face nord de la butte. Tiens, le buste de Dalida sur la gauche. Non, ne partez pas tout de suite vers la Place du Tertre, vous allez tout gâcher. Revenez à droite et faites un petit détour par la Rue d'Orchampt, en traversant la Rue Lepic (où on bouffe du riz cantonais). Sur votre gauche la statue du Passe muraille, place Marcel Aymé, sculptée par les mains de Jean Marais. Sur votre droite le moulin de la Galette, vous échappez peut-être au musée d'Orsay (que j'adore) mais vous avez l'original. Dans le virage de la Rue d'Orchampt, la maison de Dalida vous autorise aussi un coup d'œil voyeur. Au bout de la rue, prenez à droite pour un pélerinage obligatoire au Bateau Lavoir, haut lieu de talent, où ont séjourné Modigliani, Radiguet, Cocteau, Apollinaire, Jarry, Matisse et tant d'autres. Prenez ensuite sur votre gauche et après avoir découvert l'immeuble où vivait Picasso, suivez les traces d'Amélie Poulain, l'épicerie est à gauche. Remontez vers le Sacré Cœur. Posez vous sur les marches et vous découvrirez la sensation inoubliable, oui, la vraie sensation, vous possédez Paris. Revenez Place du Tertre et si vous consentez à vous faire croquer le portrait, demandez Picasso. Là, la fenêtre au milieu au dessus du C de la Mère Catherine vivait Coccinelle, passez lui le bonjour pour moi. Je vous autorise à payer votre bière une fortune pour vous délecter de l'ambiance. Sinon, faîtes comme moi, achetez votre 16 fraiche chez Farid et retournez vous poser sur les marches. Buvez tranquille, respirez en vous éblouissant avec le Carrousel et descendez droit devant vous. Vous rejoindrez Pigalle, ses sex shops aux néons rétro, sur votre droite les pâles du Moulin Rouge.

Le 9ème vous accueille, la balade est finie. Allez, finissez en beauté. Allez saluer Sartre et De Beauvoir au cimetière, Michel Berger aussi et filez vers la Place Clichy. Si vous aimez les fruits de mer, prenez les à emporter au Wepler, sinon, vous aurez fait vos courses au Marché du Poteau. Rentrez, vite, ce serait vraiment dommage de ne pas finir par un dîner aux chandelles.

J'ai du raccourcir, vous n'avez pas tout, parce que je pourrais vous pondre facile deux cents pages et je n'ai tout de même pas envie de vous faire subir ça. Pour information, je suis une guide gratuite, je suis prête à vous accompagner, vous raconter, vous faire découvrir, mon 18ème. Et j'aime vraiment ça. A bon entendeur...

Reprise des hostilités

Hier, c'était ma rentrée de pionne au collège... enfin disons reprise, car je n'ai pas vraiment profité pleinement de mes vacances entre les révisions et le concours.
Ça a commencé par 1h de surveillance de récrée, manches courtes et posage de cul à l'endroit stratégique de la cour, le rebord du portail, vision à 180° assurée, face au soleil... j'ai choisi mon poste !
J'ai donc observé.
Les 3è fébriles révisant leur brevet blanc entre 2 bisous dans les toilettes, mais l'autre surveillant de service de cour, le bizut (il remplace un démissionnaire qui n'a pas supporté la pression fiscale de ses études et qui a trouvé un job de merde mieux payé emploi plus épanouissant), veillait, tout jouasse de cette nouvelle expérience qu'est le vidage des toilettes.

Car les toilettes du collège sont un haut lieu de réjouissances en tous genres. Du pas de tektonik mal habile au mini break hip-hop... ils appellent ça des battles... vaut mieux ça qu'une bonne baston à ce que j'leur ai dit. Des confidences secrètes entre poufs dans le cabinet du maire au tournantes de psp devant les lavabos.
Et puis un jour, il y a eu cette inscription sur la porte d'une des chiottes : celui qui nettoie ça enculé. Ça a fait tout un drame parce que c'était dans les toilettes des filles, mais que non, au grand jamais, c'était pas elles. Crainri ma gueule c pas nous m'dame, qu'elles ont dit à la principale venue constater la chose.
Le coupable court toujours.
Depuis, on laisse les toilettes fermées, et les élèves doivent venir demander qu'on leur ouvre.
Nous sommes toutes et tous des dames pipi en puissance.
Sauf pendant la récrée de midi, quand on est 2 ou 3 surveillants dehors. Il faut donc les vider régulièrement, sinon les 6è n'osent pas aller pisser, du coup ils sont tout stressés, ils pleurent et on se fait engueuler par les parents après.

Les 4è, le cul entre 2 chaises, partagés entre l'envie de faire comme les grands et de squatter les toilettes et les bancs du préau, et de jouer à chat avec les petits. J'ai même surpris des petits couples se former... c'est mignon... les mains s'effleurent, les joues rougissent, les garçons bafouillent, les filles sont à moitié hystériques... et si en plus, on a le malheur de citer un certain groupe teuton, on a le droit à des petits cris se rapprochant plus de l'ultrason que du plaisir.

Les 6è et les 5è jouent encore ensemble, mais ne sont pas attirés par la mixité... d'façon, les garçons, y sont tous nuls... pis les filles elles sont trop embêtantes, d'abord... les garçons font du catch et les filles nous refont la choré de Papillon de lumière ou de Kamel Ouali...

Parfois tout ce petit monde dérape, dépasse les limites de l'entendement dans la gestion d'une communauté (une baston de chez baston, quoi... ça n'arrive pas souvent, mais croyez-moi, faut y aller !), mais c'est pas si fréquent que ça !
Donc là, tout s'est très bien passé... je me suis bien levée une ou deux fois pour aller vider le couloir de la vie scolaire (et me désaltérer accessoirement), mais c'est tout. De loin, quelques recommandations...
- Attention Linford, ne jette pas Malcolm au sol comme ça, vous allez vous faire mal...
- Eh bidule Kévin, arrête de mettre des steaks à Shirley...
- Fatou range ce portable ou j'te l'confisque, j'appelle tous mes amis à l'étranger (Vénézuela, Angleterre, Nouvelle-Calédonie...) et j't'éclate ton forfait bloqué...
...'fin des trucs dans le genre !

Dans l'après-midi, j'ai eu le temps de saisir l'intégralité des billets d'absences, en les classant par jour-classe-niveau... c'est toujours ça qu'on n'aura pas à refaire pour l'archivage. C'est dire si il y avait du boulot !

Et ce matin, après mon heure de surveillance d'un contrôle (c'était des 6è, je peux vous dire qu'il n'y a pas eu un mot plus haut que l'autre, non mais !), j'ai pris une perm'... 3 élèves... j'ai appris LA nouvelle... la petite soeur de Britney, Jamie Lynn Spears, est enceinte à 16 ans ! C'est de source sûre, Dream'up, il me semble... j'ai du sortir de la perm' pour aller m'en griller une sur la terrasse-fumeur on a le droit officieusement si on jette pas les mégots du 3è étage.
Vous l'aurez compris, lectrices z'et lecteurs, ce collège est sur 5 niveaux... parvis, administration, vie scolaire et cour, salles de classe sur 2 étages.
Un seul ascenseur.
Une seule clé pour tous les surveillants. Mais c'est pas la question.

Vivement jeudi lundi mardi prochain... d'autant que le 15 mai, c'est la grèèèèèève !

lundi 5 mai 2008

Prospection et Tai-Chi-Chuan

Hier, c'était une journée sympa. D'abord, parce que j'ai fait deux ventes et que j'avais un mois d'avril tout pourri que j'ai du coup rattrapé en cinq jours en mai, ça soulage. Aussi, parce que les gens suivent vraiment la météo, je croise que des Catherine Laborde, quand il fait beau, ils sont vraiment super sympas et trop de bonne humeur, ça soulage. Enfin, parce que j'ai rêvé que l'autre pétasse se faisait massacrer par le juge et que, du coup, ça m'a soulagée.

Bref, belle journée. Je devais même finir en beauté. Mais, la maternité n'offre pas que des réjouissances et parfois, tout ne se passe pas comme on le voudrait. Elle a peut-être eu peur la gamine de rencontrer une vraie vampire. Buffy, c'est pour les petites joueuses... Non, vous l'aurez compris, je blaguais. Mes blagues sont nulles, n'oubliez jamais. Ce n'est que partie remise et dîtes à cette gosse que je ne suis pas une vampire, pour de vrai. Et comme dirait sa mère, je lollerais bien là, mais je me retiens. Bouh je m'embarque dans des trucs des fois...

A quatorze heures, je suis partie en prospection. L'exercice est simple, il suffit de monter dans les immeubles, de frapper aux portes et si, par miracle (ou par malchance, parce que si les gens sont chez eux, c'est qu'ils ne sont soit pas au boulot, soit malades) quelqu'un ouvre, il faut sortir son plus beau sourire et dire :
- Bonjour, je suis MaB et je suis vraiment navrée de vous déranger en plein après-midi. Je travaille pour l'agence qui fait des toits avec ses bras et je suis à la recherche d'appartements à vendre ou à louer pour mes clients. Savez-vous s'il y a quelqu'un qui voudrait vendre dans votre immeuble ?
Là, au choix :
- Voilà le nom et le numéro de téléphone d'un type, que peut-être, il vendrait mais faut vérifier, je sais plus, c'était à la crémaillère du locataire du quatrième, j'étais un peu bourré.
ou
- Pfff je sais pas moi, pis je fais la sieste, repassez plus tard.
ou
- La madame elle est pas là, mais je peux laisser un message.

Et là, c'était Ma journée. En moins d'une heure, j'ai eu deux numéros de téléphone. Les années de métier me servent au moins à quelque chose, quand on a deux supers tuyaux en prospection, on est au maximum. En général, on récolte ça en deux heures. Si tu les as eu en moins de temps, tu arrêtes, parce qu'après, t'auras beau insister, t'auras plus rien. Tu vas faire que réveiller des gens. J'ai donc arrêté.

Comme il faisait vraiment très beau, la procrastination a repris le dessus. Je me suis dit que les cinq cent mailing qui me restaient à plier et mettre sous enveloppe pouvaient bien attendre encore un peu. Ce qui n'était pas que de la procrastination innocente, puisqu'en effet, j'étais sensée assurer la permanence et l'accueil de 17h30 à 19h00. Le lundi, l'assistante, qui a la tâche ingrate d'assurer cette fonction, est en repos et une fois n'est pas coutume, mon patron avait du boulot. Ca ne lui prend pas souvent et jamais plus de deux heures. Je me plie donc à la règle, quelque soit la météo.

J'étais à côté du Parc de Choisy (c'est dans le 13ème, j'aime bien ce parc, il est si calme). La mission mailing a vite été remplacée par la mission sitting.

Quand j'ai franchi la grille verdâtre, j'ai vu Gérard qui comatait au soleil et qui buvait une de ses bières dégueulasses. Il est sympa Gérard, la vie a du bon avec lui, il sourit tout le temps. Le seul défaut de Gérard, c'est qu'il ne respecte pas le périmètre de sécurité. Quand il demande une pièce ou qu'il raconte une blague trop pourrie à quelqu'un, il met toujours sa tête à deux centimètres de son interlocuteur. Il refoule sérieusement du goulot Gérard, alors quand il me fait le coup dès le matin, après le café, c'est un peu écoeurant. Il appelle toutes les femmes "mon petit lapin" et il a tout le temps envie de faire des bisous. Il se fait jeter, souvent. Un jour, je lui ai dit que c'était à cause de sa barbe, elle est tellement chargée. Il se met si près qu'on voit le puceron mort et le menu des restos du coeur depuis un trimestre. Il m'a vu arriver et comme c'est un gars poli, idiot mais poli, il s'est redressé.
- Salut MaB, ça va comme tu veux ? Va pas y avoir grand chose à vendre ici.
- Je viens prendre le soleil.
- T'as raison mon petit lapin.
Gérard avait un pile de métro à côté de lui. Il les vole dans le casier de la place d'Italie et il les revend à des crétins qui n'ont pas compris que c'était un journal gratuit.
- Je peux t'en prendre un ?
- Mais sers toi mon petit lapin !
Je lui ai pris un métro, mais ça me tracassait de ne pas jouer le jeu. Par moment, je l'enverrais bien ad patres cette bonne conscience judéo-crétine. Je lui ai filé deux cigares, il était tout pêteux de miel et de bonheur. C'était jour de fête. Je me suis dirigée vers la pelouse, j'ai croisé une marelle dessinée à la craie. On s'est regardé dans le fond des yeux avec Gérard. Les miens lui annonçaient que j'étais fière de ma petitesse intellectuelle, les siens salivaient d'avance. Et me voilà, dans mon tailleur-chemise tout propret, le cartable en cuir à la main en train de sauter à cloche-pied jusqu'au ciel. Gérard était plié en deux, un rire gras qui s'est très rapidement transformé en quinte de toux. J'ai bien cru qu'il allait mourir étouffé par sa bière cet idiot. Que ce soit clair, dans ce genre de circonstances, faut savoir sauver sa peau, pas question de se laisser tenter par un bouche à bouche. J'ai même pas l'AFPS, je sais pas faire, comme ça c'est réglé.

J'ai étalé ma veste au sol et je me suis mise en position de guetteuse d'avions. J'ai commencé à lire le métro de Gérard, le soleil me picotait le visage, c'était très agréable. Le plaisir n'a été que de courte durée. Métro c'est vraiment un torchon, heureusement que c'est gratuit, je comprendrais pas que les gens achètent ça. Les articles sont truffés de fautes d'orthographe (même moi je les vois, c'est dire) et les tournures de phrases sont dédicacées aux illettrés en tout genre. Je l'ai vite reposé, je sais que je suis une proie facile, que je peux m'abêtir facilement, alors je me protège. C'est que c'est délicat un cerveau, si on le nourrit mal, ça peut vite se rabougrir.

J'ai relevé la tête pour m'occuper en regardant le monde. Puisqu'aucun avion ne survole Paris. Il y avait un groupe de vieux chinois qui faisait des mouvements de Tai-chi-chuan. Il y a trois situations dans lesquelles je me sens parfaitement apaisée : quand je regarde des gens pratiquer le Tai-chi-chuan, quand j'essaye de suivre la balade d'un poisson des yeux et quand je reluque ma femme dans son sommeil. La dame qui était devant m'a sourit, j'ai rendu. Fin de la communication. Parfois, ça peut suffire.

Après, je suis restée concentrée un moment sur un arbre. Il avait l'air malade. Bêtement, ça m'a contrariée. Mes clignements ne l'ont pas guéri, moi si.

Et puis, j'ai fait le point. J'aime bien faire ça. Mon psy dit que c'est normal et que c'est sain, alors je ne me pose pas trop de questions. C'est lui le médecin. Il dit que je peux, je continue. J'ai fait le point sur ma vie, mes états d'âmes de trentenaire plus six, mes échecs et mes réussites. J'ai pensé à ma femme aussi, beaucoup. Elle est quand même vachement patiente. En y réfléchissant bien, elle mériterait peut-être mieux que moi, mais je vais être sincère avec vous, j'ai pas envie qu'elle cherche. Je me suis dit que j'étais une sacrée veinarde de l'avoir près de moi. C'est pas toujours les meilleurs qui ont de la chance, les autres aussi. Je me suis dit que d'être en accord sexuellement, intellectuellement et humainement avec quelqu'un c'était pas donné à tout le monde et qu'il fallait surtout que je me donne à fond pour être le petit machin essentiel à sa vie. Ca m'a requinquée.

Je suis retournée bosser, j'avais la patate. J'ai déniché un vrai mandat prospection dans la foulée. Je suis revenue à l'agence tout sourire. Mon patron me déteste, ça le dérange vraiment que je sois bonne en étant honnête. Tant pis pour lui. Il peut pas comprendre, il a pas de Kanou.

Quand elle est rentrée de son entrainement, je lui avais préparé le bon petit repas que j'avais prévu pour notre invitée. Elle a trouvé ça bon.

Je suis relancée, merci le Parc de Choisy. Je suis toute pleine d'amour que j'ai envie de lui donner.

Vous allez voir ce que je vais en faire moi, du stress du concours, de l'orpheline, de cette vie compliquée qui nous tombe sur la tête, de tous ces défauts qui mettent un joyeux capharnaüm, pas toujours joyeux, de ce quotidien parfois lourd à porter, parce que je me laisse si facilement aller. Je vais en faire de l'amour.

- C'est bien de faire de l'amour avec tout, non ?
- NON

- Ok...

Espace vécu, espace perçu

Alors que j'étais en train de boucler mes révisions pour le concours de prof des écoles (ça va se savoir, à force de le répéter !), j'ai observé la représentation cartographique de mes statistiques Google Analytics.
Ouaaaa... y'en a du monde ! Equateur, Pérou, Canada, Allemagne, Suède, Norvège, Liban, Suisse, Belgique, Pays-Bas, Réunion, Algérie, Madagascar, Maroc et bien sûr, France...
Mon œil aiguisé de géographe n'a fait qu'un tour : quelle drôle de répartition des lectrices z'et lecteurs de ce blog !
Et comme pendant mes lonnnngues études, qui n'ont pas servies à grand chose à part une grande culture générale (ouais, allez-y, demandez-moi où se trouve n'importe quelle capitale, et j'vous refais le portrait, non mais ! C'est pas que ça la géographie !) on m'a formée à un truc énorme : le commentaire de cartes et le croquis de synthèse dynamique (oui madâme, oui môssieur !). Mais ça fait un bail que je n'ai plus fait ça... j'ai un peu simplifié l'exercice.

C'est là que le bon géographe (oui... il y a aussi le mauvais géographe... un jour je vous expliquerai peut-être la différence entre le bon géographe et le mauvais géographe...) intervient : localisation-description-explication, telle est la Trinité qui guide ses pas.
Donc, en feuilletant un bouquin de géo de première (oui, je n'écris pas au fil de la plume du clavier, je fais aussi des recherches documentaires pour une meilleure information ! Je n'ai pas non plus de nègre qui me fait des fiches pour rédiger mes billets), je suis tombée sur une carte des angles morts de l'espace français. Il s'agit d'espaces enclavés, souvent ruraux, et périphériques (du genre la Corse, les Alpes du Sud, les vallées pyrénéennes, les plateaux du massif central). Et si l'on prend les zones situées à plus d'une demi-heure d'une autoroute (ou 2x2 voies) et/ou à plus d'une heure d'une gare de TGV, force est de constater que les lectrices z'et lecteurs de ce blog n'y habitent pas, ou du moins, ne s'y connectent pas : les espaces enclavés ne vous attirent pas. Vous vous connectez du bord des routes, et donc des fleuves.
Soit.
Vient maintenant LA vraie question : mais qu'est-ce qui a bien pu pousser mes lectrices z'et lecteurs à fuir ces angles morts (ou du moins à ne pas s'y installer) ?
Ouais. Je vous entends : on s'en fout un peu... c'est bien là le drame du bon géographe.

Voici un petit croquis de ce que cela m'a inspirée, lorsque MaB m'a demandé des explications.
Un croquis donc, ainsi que son inséparable légende, car un croquis sans légende, n'est pas vraiment un croquis, sous peine d'interprétations erronées et/ou fantasques du dit croquis.


Je commencerai par deux localités qui ont le mérite d'être citées ici, sur un blog tenu par 2 lesbiennes.
En 1, nous avons Morlaix, Montroulez en breton du Léon (c'est un des 9 évêchés de Bretagne, il y en a autant que de rayures noires et blanches sur le gwenn ha du, 4 blanches pour la Basse Bretagne, Léon, Tréguier, Cornouailles et Vannes, et 5 noires pour la Haute Bretagne, Nantes, Rennes, Saint-Malo, Saint-Brieuc et Dol).

En 2
, nous avons Castelnau-le-Lez. Le Lez est un fleuve côtier de la région montpelliéraine, léz-ardant entre plaine étroite et gorges, généralement calme, tantôt impétueux lors des fameux orages cévenols, ses crues ont été dénommées les lézades... ça ne s'invente pas.

En 3, il y a les Pyrénées, montagnes jeunes desquelles la Garonne prend sa source pour aller se jeter dans l'Océan Antlantique. Alors on dit montagne jeune parce que, comme les Alpes, elles sont plus récentes, et donc moins érodées, que les massifs Central et Armoricain. Les Pyrénées se sont formées à la suite de la collision de la plaque africaine avec la plaque eurasienne... et quand on pince du terrain plus ou moins maléable, ben ça plisse... ça a donné des chocapics les Pyrénées. Et les Alpes aussi. Et puis tout un sacré bordel dans le reste du relief de la France. Mais j'y reviendrai.
Ca peut donner ça, en vrai :





En 4, voici les plateaux d'Auvergne. Avant, il y avait des volcans... de la forêt tropicale et des dinosaures... c'était il y a entre 1 et 25 millions d'années (une crotte de mouche à l'échelle des temps géologiques). Et n'en déplaise aux auvergnatEs, ils sont éteints à jamais, JAMAIS il ne crachera plus de lave par ces cratères. Sans parler du Cantal, plus grand stratovolcan d'Europe avec ses 70 km de diamètre...
Aujourd'hui, ça donne à peu près ça :




En 5, tout le monde les avaient reconnues, les Alpes. J'y ai pas mal usé mes godasses et mon énergie... surtout entre Sisteron et Gap pour mon taf, dans les Ecrins aussi un peu. C'est dans les Hautes Alpes que j'ai volé pour les premières (et dernière) fois... enfin que j'ai "parapenté"... le lac de Serre-Ponçon et la Montagne de Lure vus du ciel... énorme, palpitant, magnifique... je préfère quand même l'ULM... moins risqué en terme de courants ascendants.
Une fois l'an, on peut aussi y voir un citron serpentant en 8 à flan de montagne... une particularité à ne manquer sous aucun prétexte !!

En 6, haut lieu de la technologie de pointe française, j'ai nommé le Futuroscope.
Voilà.
Quoi dire de plus, à part que j'ai vomi mon gouter après la simulation de vol du genre "je suis un papillon", qu'on voyait des écrans de partout même sous les sièges... et que j'ai fait chier mes parents pendant toute l'après-midi (et même tout le week-end il me semble, mais là n'est pas la question... on est con lorsqu'on a 14 ans et qu'on loupe THE méga-fiesta sur Paris) après parce que j'avais faim.

En 7, aaah le Val de Loire... je n'y aurai pas commencé ma thèse, je n'aurai pas découvert ce havre de paix et de quiétude... du bon vin, du fromage de chèvre, pas de touristes (à part tout un camping de hollandais, dans lequel nous logions avec le groupe du CNRS... ils étaient ultra équipés par rapport à nous, scandaleux... en plus ils étaient vieux... à part peut-être cette... mais chut, quest-ce que je raconte, moi ?!) et la Loire à 20° l'été, 5° l'hiver, quand c'est pas gelé... le pied !
Un coucher de soleil, au cas où ça ne vous paraitrait pas plausible :



En 8, c'est là que ça se complique un peu pour vous. Tout à l'heure, j'ai évoqué la remontée de la plaque africaine vers le Nord, et donc la plaque européenne. J'avais parlé des Pyrénées et des Alpes. Bon. Et bien il se trouve qu'en plissant tout ça, le bout de la plaque (l'actuelle France) a basculé vers le Nord, comme si on avait fait levier au niveau des Pyrénées pour soulever tout ça.
Avant ce basculement, il y avait la mer au niveau du Bassin Parisien, du Massif Armoricain à l'ouest, au Massif Schisteux-Rhénan (en gros les Vosges, on va pas chipoter). Une grande et belle mer tropicale, avec des tas de petits mollusques et autres animaux préhistoriques qui meurent parfois et qui tombent au fond de l'eau : ça fait des couches (on dit des strates, aussi). Et plus il y en a, de couches, plus c'est lourd, plus le centre s'enfonce (essayez dans une bassine, vous verrez).
Donc, un jour, il y a eu ce basculement (vous suivez ?). Toute l'eau de la mer est partie (où ça, j'en sais trop rien... vers le Nord sans doute !), et il est resté ces couches, enfoncées au centre (c'est ce qui correspond à l'Ile-de-France) et relevées sur les bords, c'est ce qu'on nomme les cuestas du Bassin Parisien. On y cultive aujourd'hui de très bon vins, sur les côtes de Meuse ou de Moselle par exemple.

En 9, pour l'avoir testé une fois, à ses débuts, la station de ski de Noeux-les-Mines est une particularité à ne pas louper si vous êtes dans le coin ! Barres de rire assurées !

En 10, la Corse, pour ne nommer qu'elle. On ne sait jamais... On peut y faire des randos sympas, comme le GR20 (ça me fait penser qu'un jour il faudrait que je vous parle de cette expérience pédestre intense...).

vendredi 2 mai 2008

Gang de requins (when you're a jet)

Le 22 avril dernier, si vous avez bonne mémoire (bah, si , faites un effort, c'est pas si loin...), j'ai écrit quelques mots sur mes chers clients, ou au moins, ceux qu'il m'arrive de côtoyer le plus souvent... En les égratignant un peu, même si je l'ai fait très gentiment, je vous avais dit qu'un jour prochain, je vous ferais une petite bafouille sur mes confrères. Ce jour est arrivé.

je plante le décor : un quartier divisé en sous-secteurs que nous numéroterons de un à dix pour plus de clarté ('tends on va pas les perdre dès le début), des concierges, des commerçants, des acquéreurs et des vendeurs. Au coeur de la meule, à l'épicentre, un agent immobilier. L'agent immobilier est un animal : tantôt un chien flairant, une charogne, un prof hibou ou un écureuil qui économise ses noisettes.

Pour comprendre ce qui va suivre, il vous faut d'abord savoir en quelques mots en quoi consiste ce curieux métier. Contrairement à ce que vous pourriez croire, le travail de l'agent immobilier ne consiste pas à vendre des appartements/maisons/parking/hangars/trous à rats, non, le vrai boulot de l'agent immobilier, c'est de trouver la matière, de dénicher la perle dans un torrent d'excréments où vous ne verriez même pas pousser de champignons... L'agent immobilier est une sorte de détective privé plus véreux et vicieux qu'une fouine. Parce que tous les moyens sont bons pour y parvenir. De la gardienne qui salive en voyant le contenu de l'enveloppe au propriétaire peu scrupuleux qui frétille, des euros plein les yeux. Du porte à porte, pour trouver le nom et surtout l'adresse, du propriétaire du troisième étage dont l'appartement est vide depuis des mois. Des prospectus qui vous éclatent les doigts parce qu'ils coupent mais dont on inonde quotidiennement vos boîtes aux lettres en caressant l'espoir qu'ils génèrent des appels.

Bref, dans un monde de requins, moi, petit poisson rouge, j'ai du user de toutes mes qualités humaines intrinsèques. Il fallait survivre, alors si avec mes clients, acquéreurs ou vendeurs, je reste naturelle et donc "poisson rouge", avec mes confrères, je sors mon aileron en plastique (mais il fait tellement vrai, qu'ils fuient devant le trompe-l'oeil).

Puisque nous travaillons essentiellement dehors, le territoire de l'agent immobilier, c'est la rue. Entre les dealers, les macs, les gens du voyages, les forains et les vendeurs de marchés. La rue a ses codes et surtout sa hiérarchie, je l'ai très vite compris. Pas question de pisser à chaque carrefour pour marquer son territoire, il s'agit plutôt de s'allier, d'être l'amie de tout le monde. Si vous avez déjà des amis, une vie plutôt sympa, il vous faudra l'oublier et faire naitre cet autre vous "de la rue".

Du poisson à l'oiseau, il n'y a qu'une aile.

Tout en haut de la chaîne alimentaire, il y a la charogne. Celui (ou celle, les hommes n'ont pas l'apanage de la cruauté) qui vendrait sa mère pour s'offrir un rythme de vie luxueux. Ils n'hésitent pas à cramer 200 euros en une soirée boîte le samedi soir, bouffent au restaurant tous les midis, même s'ils ne sont jamais invités par leur clients, se sapent sur mesure, font briller la rollex, la chevalière et la gourmette et prennent éventuellement un pseudonyme pour s'offrir une vie décomplexée à la hauteur de leurs espérances. Ils s'appellent donc "Duplex", voire "Triplex", "Harry" (à cause de Potter ou du film qu'ils n'ont jamais vu, mais ils savent juste qu'Harry est un ami qui vous veut du bien, c'est le titre qui le dit), "Affair" (sans le -e- ça le fait mieux). Parfois, Karim devient Patrick et Consuela devient Vanessa, pathétique. Tout est bon, pour gagner du pognon, même jouer le rôle des fachos. Ouaip.

Si nous dévoilons la seconde poupée russe, nous pourrons voir apparaitre le second de file : maître Hibou. C'est une espèce extraordinaire qui contrairement à son pendant animal ne vit pas que la nuit, mais est capable d'ululer des heures durant. Ils vous tartineront de leur science, ô combien divine, connaissent les derniers textes votés par une assemblée de merde par coeur et sauront vous rappeler que non, la Loi de Robien n'est pas fiscalement plus chatoyante que la Loi Borloo, qu'on se le dise. Ils sont parfois une sorte d'hybride improbable : hibou-araignée. Si par malheur, vous touchez la toile qu'ils auront tissée pour vous, vous serez subitement guidé par une lumière blanche envahissante et éblouissante.

Sur la troisième marche du podium est perchée la pie. Curieux piaf criard et bonimenteur. Ses ultras sons nauséabonds paralysent votre oreille interne, vous perdez votre équilibre à l'instant où éclatent vos tympans sous une gerbée de palabres hypnotisantes et incohérentes. En clair, il vous ferait bouffer de la merde que croiriez encore que c'est du chocolat.

Dans les roues de la pie, le maillot rose à pois, le grimpeur, l'endurant, le serpent à plumes. Tout juste assez verbé pour hoqueter bafouiller péniblement trois mots, il jouera de cet embarras en le maquillant de timidité. Sa langueur lenteur vous bercera et vous mourrez étouffés ou envenimés.

Un peu à la traine, l'albatros, qui souffre des mêmes tares qu'un vol régulier d'Air France. Le décollage et l'atterrissage. Après quatre faux départs, il mourra sur la ligne d'arrivée barbotant dans son incompétence.

Enfin, le vilain petit canard, le faux oiseau, celui qui a les pieds dans l'eau et qui voudrait bien toucher les nuages. Celui qui vivote tant bien que mal au milieu de ces prédateurs. Celui qui malgré l'oppression, la terreur, survit, parce que les bons le nourrissent. Est-ce de la pitié, de la tendresse, peu importe, il gobe chaque miette de pain.

Et si dans "un petit poisson, un petit oiseau s'aimaient d'amour tendre" sachez que cette merveilleuse fiction n'a sa raison d'être que dans la chanson.

Toute l'idée est là. Se singulariser, se démarquer de cette masse de plumes à becs, trouver l'essentiel. Etre aussi professionnelle que possible, pouvoir se regarder dans une glace, garder les pieds sur terre et la tête pleine de rêves. Surtout ne jamais, jamais se laisser tenter par le côté sombre de la force. Rester poisson.