Le 22 avril dernier, si vous avez bonne mémoire (bah, si , faites un effort, c'est pas si loin...), j'ai écrit quelques mots sur mes chers clients, ou au moins, ceux qu'il m'arrive de côtoyer le plus souvent... En les égratignant un peu, même si je l'ai fait très gentiment, je vous avais dit qu'un jour prochain, je vous ferais une petite bafouille sur mes confrères. Ce jour est arrivé.
je plante le décor : un quartier divisé en sous-secteurs que nous numéroterons de un à dix pour plus de clarté ('tends on va pas les perdre dès le début), des concierges, des commerçants, des acquéreurs et des vendeurs. Au coeur de la meule, à l'épicentre, un agent immobilier. L'agent immobilier est un animal : tantôt un chien flairant, une charogne, un prof hibou ou un écureuil qui économise ses noisettes.
Pour comprendre ce qui va suivre, il vous faut d'abord savoir en quelques mots en quoi consiste ce curieux métier. Contrairement à ce que vous pourriez croire, le travail de l'agent immobilier ne consiste pas à vendre des appartements/maisons/parking/hangars/trous à rats, non, le vrai boulot de l'agent immobilier, c'est de trouver la matière, de dénicher la perle dans un torrent d'excréments où vous ne verriez même pas pousser de champignons... L'agent immobilier est une sorte de détective privé plus véreux et vicieux qu'une fouine. Parce que tous les moyens sont bons pour y parvenir. De la gardienne qui salive en voyant le contenu de l'enveloppe au propriétaire peu scrupuleux qui frétille, des euros plein les yeux. Du porte à porte, pour trouver le nom et surtout l'adresse, du propriétaire du troisième étage dont l'appartement est vide depuis des mois. Des prospectus qui vous éclatent les doigts parce qu'ils coupent mais dont on inonde quotidiennement vos boîtes aux lettres en caressant l'espoir qu'ils génèrent des appels.
Bref, dans un monde de requins, moi, petit poisson rouge, j'ai du user de toutes mes qualités humaines intrinsèques. Il fallait survivre, alors si avec mes clients, acquéreurs ou vendeurs, je reste naturelle et donc "poisson rouge", avec mes confrères, je sors mon aileron en plastique (mais il fait tellement vrai, qu'ils fuient devant le trompe-l'oeil).
Puisque nous travaillons essentiellement dehors, le territoire de l'agent immobilier, c'est la rue. Entre les dealers, les macs, les gens du voyages, les forains et les vendeurs de marchés. La rue a ses codes et surtout sa hiérarchie, je l'ai très vite compris. Pas question de pisser à chaque carrefour pour marquer son territoire, il s'agit plutôt de s'allier, d'être l'amie de tout le monde. Si vous avez déjà des amis, une vie plutôt sympa, il vous faudra l'oublier et faire naitre cet autre vous "de la rue".
Du poisson à l'oiseau, il n'y a qu'une aile.
Tout en haut de la chaîne alimentaire, il y a la charogne. Celui (ou celle, les hommes n'ont pas l'apanage de la cruauté) qui vendrait sa mère pour s'offrir un rythme de vie luxueux. Ils n'hésitent pas à cramer 200 euros en une soirée boîte le samedi soir, bouffent au restaurant tous les midis, même s'ils ne sont jamais invités par leur clients, se sapent sur mesure, font briller la rollex, la chevalière et la gourmette et prennent éventuellement un pseudonyme pour s'offrir une vie décomplexée à la hauteur de leurs espérances. Ils s'appellent donc "Duplex", voire "Triplex", "Harry" (à cause de Potter ou du film qu'ils n'ont jamais vu, mais ils savent juste qu'Harry est un ami qui vous veut du bien, c'est le titre qui le dit), "Affair" (sans le -e- ça le fait mieux). Parfois, Karim devient Patrick et Consuela devient Vanessa, pathétique. Tout est bon, pour gagner du pognon, même jouer le rôle des fachos. Ouaip.
Si nous dévoilons la seconde poupée russe, nous pourrons voir apparaitre le second de file : maître Hibou. C'est une espèce extraordinaire qui contrairement à son pendant animal ne vit pas que la nuit, mais est capable d'ululer des heures durant. Ils vous tartineront de leur science, ô combien divine, connaissent les derniers textes votés par une assembléede merde par coeur et sauront vous rappeler que non, la Loi de Robien n'est pas fiscalement plus chatoyante que la Loi Borloo, qu'on se le dise. Ils sont parfois une sorte d'hybride improbable : hibou-araignée. Si par malheur, vous touchez la toile qu'ils auront tissée pour vous, vous serez subitement guidé par une lumière blanche envahissante et éblouissante.
Sur la troisième marche du podium est perchée la pie. Curieux piaf criard et bonimenteur. Ses ultras sons nauséabonds paralysent votre oreille interne, vous perdez votre équilibre à l'instant où éclatent vos tympans sous une gerbée de palabres hypnotisantes et incohérentes. En clair, il vous ferait bouffer de la merde que croiriez encore que c'est du chocolat.
Dans les roues de la pie, le maillot rose à pois, le grimpeur, l'endurant, le serpent à plumes. Tout juste assez verbé pourhoqueter bafouiller péniblement trois mots, il jouera de cet embarras en le maquillant de timidité. Sa langueur lenteur vous bercera et vous mourrez étouffés ou envenimés.
Un peu à la traine, l'albatros, qui souffre des mêmes tares qu'un vol régulier d'Air France. Le décollage et l'atterrissage. Après quatre faux départs, il mourra sur la ligne d'arrivée barbotant dans son incompétence.
Enfin, le vilain petit canard, le faux oiseau, celui qui a les pieds dans l'eau et qui voudrait bien toucher les nuages. Celui qui vivote tant bien que mal au milieu de ces prédateurs. Celui qui malgré l'oppression, la terreur, survit, parce que les bons le nourrissent. Est-ce de la pitié, de la tendresse, peu importe, il gobe chaque miette de pain.
Et si dans "un petit poisson, un petit oiseau s'aimaient d'amour tendre" sachez que cette merveilleuse fiction n'a sa raison d'être que dans la chanson.
Toute l'idée est là. Se singulariser, se démarquer de cette masse de plumes à becs, trouver l'essentiel. Etre aussi professionnelle que possible, pouvoir se regarder dans une glace, garder les pieds sur terre et la tête pleine de rêves. Surtout ne jamais, jamais se laisser tenter par le côté sombre de la force. Rester poisson.
je plante le décor : un quartier divisé en sous-secteurs que nous numéroterons de un à dix pour plus de clarté ('tends on va pas les perdre dès le début), des concierges, des commerçants, des acquéreurs et des vendeurs. Au coeur de la meule, à l'épicentre, un agent immobilier. L'agent immobilier est un animal : tantôt un chien flairant, une charogne, un prof hibou ou un écureuil qui économise ses noisettes.
Pour comprendre ce qui va suivre, il vous faut d'abord savoir en quelques mots en quoi consiste ce curieux métier. Contrairement à ce que vous pourriez croire, le travail de l'agent immobilier ne consiste pas à vendre des appartements/maisons/parking/hangars/trous à rats, non, le vrai boulot de l'agent immobilier, c'est de trouver la matière, de dénicher la perle dans un torrent d'excréments où vous ne verriez même pas pousser de champignons... L'agent immobilier est une sorte de détective privé plus véreux et vicieux qu'une fouine. Parce que tous les moyens sont bons pour y parvenir. De la gardienne qui salive en voyant le contenu de l'enveloppe au propriétaire peu scrupuleux qui frétille, des euros plein les yeux. Du porte à porte, pour trouver le nom et surtout l'adresse, du propriétaire du troisième étage dont l'appartement est vide depuis des mois. Des prospectus qui vous éclatent les doigts parce qu'ils coupent mais dont on inonde quotidiennement vos boîtes aux lettres en caressant l'espoir qu'ils génèrent des appels.
Bref, dans un monde de requins, moi, petit poisson rouge, j'ai du user de toutes mes qualités humaines intrinsèques. Il fallait survivre, alors si avec mes clients, acquéreurs ou vendeurs, je reste naturelle et donc "poisson rouge", avec mes confrères, je sors mon aileron en plastique (mais il fait tellement vrai, qu'ils fuient devant le trompe-l'oeil).
Puisque nous travaillons essentiellement dehors, le territoire de l'agent immobilier, c'est la rue. Entre les dealers, les macs, les gens du voyages, les forains et les vendeurs de marchés. La rue a ses codes et surtout sa hiérarchie, je l'ai très vite compris. Pas question de pisser à chaque carrefour pour marquer son territoire, il s'agit plutôt de s'allier, d'être l'amie de tout le monde. Si vous avez déjà des amis, une vie plutôt sympa, il vous faudra l'oublier et faire naitre cet autre vous "de la rue".
Du poisson à l'oiseau, il n'y a qu'une aile.
Tout en haut de la chaîne alimentaire, il y a la charogne. Celui (ou celle, les hommes n'ont pas l'apanage de la cruauté) qui vendrait sa mère pour s'offrir un rythme de vie luxueux. Ils n'hésitent pas à cramer 200 euros en une soirée boîte le samedi soir, bouffent au restaurant tous les midis, même s'ils ne sont jamais invités par leur clients, se sapent sur mesure, font briller la rollex, la chevalière et la gourmette et prennent éventuellement un pseudonyme pour s'offrir une vie décomplexée à la hauteur de leurs espérances. Ils s'appellent donc "Duplex", voire "Triplex", "Harry" (à cause de Potter ou du film qu'ils n'ont jamais vu, mais ils savent juste qu'Harry est un ami qui vous veut du bien, c'est le titre qui le dit), "Affair" (sans le -e- ça le fait mieux). Parfois, Karim devient Patrick et Consuela devient Vanessa, pathétique. Tout est bon, pour gagner du pognon, même jouer le rôle des fachos. Ouaip.
Si nous dévoilons la seconde poupée russe, nous pourrons voir apparaitre le second de file : maître Hibou. C'est une espèce extraordinaire qui contrairement à son pendant animal ne vit pas que la nuit, mais est capable d'ululer des heures durant. Ils vous tartineront de leur science, ô combien divine, connaissent les derniers textes votés par une assemblée
Sur la troisième marche du podium est perchée la pie. Curieux piaf criard et bonimenteur. Ses ultras sons nauséabonds paralysent votre oreille interne, vous perdez votre équilibre à l'instant où éclatent vos tympans sous une gerbée de palabres hypnotisantes et incohérentes. En clair, il vous ferait bouffer de la merde que croiriez encore que c'est du chocolat.
Dans les roues de la pie, le maillot rose à pois, le grimpeur, l'endurant, le serpent à plumes. Tout juste assez verbé pour
Un peu à la traine, l'albatros, qui souffre des mêmes tares qu'un vol régulier d'Air France. Le décollage et l'atterrissage. Après quatre faux départs, il mourra sur la ligne d'arrivée barbotant dans son incompétence.
Enfin, le vilain petit canard, le faux oiseau, celui qui a les pieds dans l'eau et qui voudrait bien toucher les nuages. Celui qui vivote tant bien que mal au milieu de ces prédateurs. Celui qui malgré l'oppression, la terreur, survit, parce que les bons le nourrissent. Est-ce de la pitié, de la tendresse, peu importe, il gobe chaque miette de pain.
Et si dans "un petit poisson, un petit oiseau s'aimaient d'amour tendre" sachez que cette merveilleuse fiction n'a sa raison d'être que dans la chanson.
Toute l'idée est là. Se singulariser, se démarquer de cette masse de plumes à becs, trouver l'essentiel. Etre aussi professionnelle que possible, pouvoir se regarder dans une glace, garder les pieds sur terre et la tête pleine de rêves. Surtout ne jamais, jamais se laisser tenter par le côté sombre de la force. Rester poisson.
7 commentaires:
"S'il n'en reste qu'une"...
Bisous,
-MyLzz59-
Oulà quel monde de m... ! J'en avais une vague idée et là, tu m'as QUAND MEME ôté toutes mes illusions ...je crois que je ne pourrais pas faire ce métier ...
Quand j'ai acheté ma baraque, je suis tombée sur une nana complètement givrée, elle m'a fait faire le tour de la ville (que je ne connaissais pas) et m'a paumée ... délibéremment (of course) ... résultat: je suis retournée voir le gars avec lequel j'avais sympathisé et qui s'était fatigué à me faire visiter moult appartements et petites maisons(gars qui jusqu'à présent s'arrête pour me saluer), son agence et celle de la nana travaillaient ensemble, pour me faire faire les visites etc ... du coup, "son" agence a eu la moitié de la com ... et moi, j'ai acheté dans "de bonnes conditions" ...
Je vais lire le post sur le concours, j'espère que cela s'est bien passé. :)
... me suis plantée (pour le concours), Mab ... pardon !! :o
Mylzz : je seraiii celle làààààà...
Bisous aussi ! :-)
Leïla : S'il continue à te saluer, c'est un poisson rouge, le lâche pas ;-)
Pas toujours joli-joli, certes, mais ce métier à aussi son lot de satisfactions.
Ne t'excuses pas, ça me fait plaisir que tu t'inquiètes de savoir comment ma femme a géré son concours !
J'ai adoré.
Juste, il manquait "procrastination".
Mais je compte sur toi pour me le sortir en direct-live.
Faudrait voir à arrêter de l'engrainer, là, à la procrastination... parce que ce qu'on ne fait pas, ce sont les autres qui le font... bien, certes, mais qui le font quand même.
PS : ceci n'est pas un message subliminal à ma femme, je lui dis déjà en live !
L'emmerdeuse : promis, le mot "procrastination" refera une entrée théâtrale dans la prochaine bafouille... et je tâcherais de trouver un moyen de le placer en live ! :-)
Mon amour, c'est le "mot" qui est apprécié, mais cela reste quand même une attitude désinvolte, irresponsable et peu respectueuse. Et mon principal défaut, je le sais.
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