mardi 16 septembre 2008

Economie informelle

Rien à voir avec le crack boursier.
Normal, vu que l'héroïne n'est pas en vente libre.
Alors rassure-toi, je ne vends ni n'achète ni ne consomme de l'héroïne.
Ma sœur, oui.
Depuis 5 ans.
Et forcément, à un moment, ça coince avec la loi et les forces de l'ordre.
Alors elle est suivie dans un centre pour toxicomanes, son mec aussi, depuis presque 3 ans. Ils bénéficient tous les deux d'un traitement de substitution à la méthadone, avec contrôles d'urine réguliers. Lui, il bosse, et ma sœur, elle bat le beurre vient de finir une formation en infographie.

Alors il faut que je te retrace le parcours de ma sœur tout de même, parce que c'est un peu sportif, et dans le genre chaotique, c'est pas mal, aussi.

A 16 ans, elle est partie en internat dans le trou du cul des vaches pour faire un BEP agricole (ouais... nan... pas élevage bovin... élevage équin, vu qu'elle faisait du cheval à haute dose). Qu'elle a eu brillamment après ses 2 troisièmes dans un lycée parisien coté. Elle a donc décidé de continuer dans la voie de l'agriculture et de tenter un bac technologique... qu'elle a foiré de peu (mais dans l'agriculture, il n'y a pas le repêchage à l'oral... le bac, tu l'as ou tu le quittes l'as pas). Elle a bien tenté de repasser un bac général avec le CNED, mais c'était trop balaise pour elle.
Du coup, ma petite sœur s'est laissée tenter par ses premières amours, le dessin. Mes parents lui ont donc payé rubis sur ongle une année préparatoire dans une école d'arts appliqués. École qu'elle a justement pu intégrer à l'issue de cette préparation. Au bout de 6 mois, ma sœur n'allait plus en cours... panne de réveil, pas de voiture, départ en week-end... Elle s'est fait virer de l'école en question.
Qu'à cela ne tienne, la rentrée d'après, mes parents lui payaient une autre école, en 3 ans, dont elle s'est fait de nouveau virer au bout d'un an, pour absentéïsme.
Parallèlement, elle vivait avec son mec (enfin c'était pas le même qu'aujourd'hui... en 5 ou 6 ans, elle en est au troisième... hem... mais je ne juge pas... les 2 derniers étaient vraiment des blaireaux), avec son salaire, les sous de la CAF et l'argent de poche conséquent de mes parents. Et surtout, un train de vie pas en rapport avec les entrées d'argent.
L'an dernier, elle a tout de même réussi à obtenir son DAEU, et pu intégrer une formation en infographie-dessin d'animation.
Bon.
Jusque-là, c'est chaotique, mais plutôt banal.

Sauf qu'elle a toujours eu plus ou moins un comportement addictif. Et lorsqu'un de ses copains a commencé à taper de l'héroïne, elle s'y est mise aussi. Le prétexte, c'était le cancer de ma mère en 2003. C'est ma mère aussi, hein, et j'ai bien eu quelques moments de crise à cette période en me mettant des misères, en explorant mes limites face à certains stupéfiants, mais sans plus. L'absentéïsme, c'était parce qu'elle était tellement défoncée qu'elle n'arrivait pas à se lever pour aller en cours. Le train de vie de ministre, c'était les bénéfices... et pas qu'un peu.

Aujourd'hui, elle va avoir 25 ans dans 15 jours, et le 11 septembre, le jour de mon anniversaire, elle s'est fait incarcérer, son mec aussi... maison d'arrêt, suite à un jugement dans une affaire de trafic d'héroïne. Même s'ils ont fait appel, il n'est pas suspensif. Et le temps que la demande de remise en liberté soit traitée, ils y restent.
Dix ans de descente aux enfers que ma mère, que mes parents refusent de voir, surtout de réagir autrement.
Voilà.
Ma frangine est en zonzon.
Elle est douée pourtant. Elle a de l'or dans les doigts , tout ce qu'elle touche, elle le touche bien, surtout dans la musique et le dessin, et tout ce qu'elle trouve à faire, c'est se foutre en l'air avec de la merde.
Foutue maniaco-dépression.
En même temps, c'est de famille. Du côté de ma mère, on a tous une tendance à ce tempérament. Même moi. Là, par exemple, je suis en phase maniaque, j'ai la patate, je dors 6h par nuit, je déborde d'énergie, d'idées, de projets... je bégaye plus aussi... tout veut sortir de ma tête plus vite que mon flot de paroles. Chez moi, ça n'est pas encore trop handicapant... le cannabis aide à unifier toutes ces phases. Sauf que lorsqu'il s'agit d'une pathologie plus que d'une tendance, les soins sont nécessaires. Ce sont ces soins que ma sœur refuse. Du coup, tout ce qu'elle tente, et réussi (forcément, vu qu'elle est douée) foire à un moment ou à un autre lorsqu'elle repasse en phase dépressive.

Je suis partagée. Partagée entre l'angoisse de savoir ma petite sœur en prison, cet univers inconnu pour moi et dont on a des images pas très rassurantes, et la colère contre mes parents qui entretiennent cette situation depuis des années. Ma mère est même prête à vider son assurance-vie pour payer un avocat autre que celui commis d'office, c'est dire. Alors que MaB et moi, ça fait deux ans qu'on galère financièrement (avis à tiers détenteur, huissier et tout le bordel qui se déploie lorsqu'on a des dettes). Et pourtant, on s'en sort, et presque toutes seules (merci les potes).
J'espère surtout que cette épreuve va lui permettre de sortir de cette merde, de se soigner, le corps, mais l'âme aussi.

Bon, allez, je ne me laisse pas abattre, apéro ??

9 commentaires:

ZeStE a dit…

Ouép, drôle de situation... tout ce que je me suis dit, en lisant, c'est "putain"... donc, ça ne va aider personne, hein, ...
J'essaie d'imaginer à quel point ça doit être difficile de voir sa soeur dans cette situation et de ne pouvoir rien faire réellement... et tout ce qui me vient encore, c'est: "putain...".
Quant à l'attitude de ta mère, c'est juste une attitude de maman... p't'être qu'elle voit que, malgré tout, vous arrivez à vous en sortir, avec mab, alors que ta soeur a l'air d'avoir plus besoin de son aide...
Enfin, je veux bien un petit verre, pour finir.

Anonyme a dit…

Une pensée pour toi...
Pas mieux

madukid a dit…

des pensées envoyées par mail... gaffe, j'ai une fâcheuse tendance à me retrouver dans les spams!

Anonyme a dit…

Apéro?
Fais péter.
Câlin.
Tout plein.

Kanou a dit…

Ouep... merci.
Le plus dur, c'est de verbaliser l'angoisse qui m'envahit.
Si ça ne passe pas, j'irai consulter.

Apéro du dimanche... euh... c'est pas maintenant qu'on flanche !! ;-)

Anonyme a dit…

Comme un con !
Comme un con, je clique sur le lien qui traine sur le blog de l'Emmerdeuse, pour voir... et là, PAF ! Dans ta gueule grand con !
Alors, si je puis me permettre un conseil, vachement pas "politiquement correct", mais qui m'a permis de ne pas hurler à la mort quand des emmerdes grosses comme des portes-avions me sont tombées dessus, enfin, c a marché pour moi, je garantis pas que ca marche pour les autres ...
Dans les cas de chiasses vertes majuscules, de diarrhées mousseuses verdatres, je fais comme les tortues ou les escargots, je me fous dans ma coquille, et je vis pour ma gueule.
L'egoïsme, c'est pas bien, mais ca permet de survivre...
Plein de bises (si j'ai l'droit)

Kanou a dit…

Merci du conseil, "grand con" (bon, en même temps je ne te connais pas comme ane... onyme). Le truc, c'est que j'ai déjà du mal à en sortir de cette coquille, que si je m'y remets, ce sont des années de boulot foutues en l'air. Et puis je ne peux pas abandonner ma sœur... déjà que je ne le fais pas avec mes élèves, alors ma frangine...
Donc j'éponge.
Donc j'angoisse.
Donc de temps en temps, je décompense.
Ça fait un peur peur sur le moment, mais ça passe. Je ne sais pas faire autrement.

Mais toutes les bises sont bonnes à prendre !!

H a dit…

Je ne t'embrasse pas, ni te fais de calins, j'aime pas ça. Des trucs de filles...
Juste, je pense que ce blog est une bonne idée, Kanou. Continue à nous écrire comme ça.
Je suis désolée de ne pas trouver les mots, sans doute l'émotion... encore un truc de filles....

Kanou a dit…

H --> tout pareil... des trucs de filles, quoi !
Sur les conseils de mon petit frère, j'ai pris mon courage à deux mains et finalement écrit à ma sœur... une lettre de grande sœur, d'amie. Je lui ai dit que je n'avais pas honte, ni d'elle, de ce qu'elle était, ni de sa situation. Et que je ne la jugeais pas, ni maintenant, ni jamais. J'espère qu'elle entendra ces mots, et qu'elle acceptera de l'aide, de moi, des autres.
Allez, bon Rosh Hashana, nouvelle étape ?